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Le nucléaire, source de conflit

Kurt Kohler, ancien directeur de la centrale nucléaire de Gösgen, évoque, sans émotion, les événements antinucléaires du milieu des années 1970

«Je n’ai jamais craint les manifestants. On connaissait les forces en présence et la police était bien organisée.» Kurt Kohler, ancien directeur de la centrale nucléaire de Gösgen, évoque, sans émotion, les événements antinucléaires du milieu des années 1970. «Une tribune avait été placée devant la centrale pour entamer le dialogue, se souvient-il. Mais j’ai constaté qu’il était vain d’avancer des arguments rationnels. C’est comparable au sentiment religieux. Face à la profession de foi antinucléaire, il est impossible de trouver un consensus.»

Sortie refusée en 1990

Le débat nucléaire a abouti à la construction de quatre centrales comprenant cinq réacteurs, de Beznau (1969) à Leibstadt (1984), qui produisent 40% de l’électricité suisse. Il a été tranché par quatre consultations populaires majeures. En septembre 1990, la sortie du nucléaire a été refusée par 52,9% des voix, et l’introduction d’un moratoire acceptée par 54,6% des voix. La prolongation du moratoire ayant été refusée en 2003, le Conseil fédéral a réaffirmé, en 2007, que le nucléaire constitue l’un des piliers de l’approvisionnement énergétique du pays. Sa part devrait cependant diminuer puisque celle des nouvelles énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermique) devrait doubler pour représenter près de 10% en 2020. La force hydraulique devrait également augmenter sa part de 4%.

Les centrales envisagées

Le débat nucléaire redémarre à la lumière des nouvelles centrales envisagées par les grands groupes électriques. Le zurichois Axpo est sur les rangs. Les Forces motrices bernoises caressent le projet d’une nouvelle centrale à Mühleberg. Enfin, Alpiq envisage la construction d’une nouvelle centrale à Gösgen. «C’est l’endroit idéal, note Peter Hirt, directeur des installations thermiques du groupe. Nous avons suffisamment de terrain à disposition, la population locale est favorable au nucléaire, et nous sommes très éloignés de la frontière allemande.» L’Allemagne, antinucléaire, refusera en effet toute installation proche de son territoire. Mais certaines communes bâloises, situées dans le périmètre de Gösgen, ont déjà fait part de leur mauvaise humeur.

Mise en service en 1979, la centrale actuelle, de conception allemande, a coûté quelque 2 milliards de francs. Le projet est devisé, lui, entre 6 et 8 milliards. La nouvelle installation ne disposerait pas d’une tour de refroidissement de 150 mètres de haut, mais reposerait sur un système plus discret de ventilateurs afin d’abaisser la température résiduelle.