Dans sa voix, un air de victoire. Aude Vermeil exulterait comme une supportrice de base de la Nati si elle n’était pas d’une nature réservée. La directrice de Fonction: cinéma et les acteurs culturels genevois ont gagné une sacrée bataille. Dans la fournaise du mois d’août passé, ils lançaient une initiative «Pour une politique culturelle cohérente à Genève», déposée en janvier, forte de plus de 14 000 signatures. Les auteurs du texte demandaient que le canton coordonne la politique dans le domaine et que cette mission soit inscrite dans la Constitution. Byzantin?

Essentiel, aux yeux d’Aude Vermeil, qui déplorait que le canton se soit déchargé d’un certain nombre de responsabilités. Le cadre de ce retrait? La répartition des tâches, dans tous les secteurs, entre l’Etat, les communes et la ville. Le principe? En finir avec le double financement d’une institution ou d’une activité. A l’avenir, cette règle pourrait bien être assouplie.

Des politiques au pied du mur

Ce mercredi, le nouveau Conseil d’Etat, présidé par Pierre Maudet, a annoncé qu’il approuvait l’initiative et qu’il la soumettrait au Grand Conseil à l’automne. Le communiqué du gouvernement apporte cette précision qui n’a pas échappé à Aude Vermeil: «L’initiative permet de revoir les modalités de financement de la culture, en les adaptant aux réalités actuelles.»

En clair, cela signifie que le canton pourrait à terme cofinancer en partenariat avec la ville les institutions dites stratégiques, le Grand Théâtre, la Nouvelle Comédie et, à l’horizon 2022, la fameuse Cité de la musique. Changement de politique en vue donc.

Le poids de Thierry Apothéloz

«Ce tournant a plusieurs raisons, analyse Aude Vermeil. Il y a d’abord l’échec de la négociation sur le Grand Théâtre entre le canton et la ville, qui continue de financer quasiment seule le paquebot. Il y a ensuite la situation de la Comédie, la nécessité de trouver, d’ici à 2020, 6 millions pour financer son fonctionnement. Et je ne parle pas du cas plus qu’épineux de la Cité de la musique qui devra, elle aussi, être subventionnée. Enfin, il y a l’arrivée au Conseil d’Etat de Thierry Apothéloz, l’ancien président des communes genevoises, qui a intégré l’Office du sport et de la culture dans son dicastère de la Cohésion sociale.»

Bref, le décor et les acteurs ont changé. Mais un nouveau casting n’est pas la garantie absolue d’une autre dramaturgie. Le socialiste Thierry Apothéloz devra convaincre le Grand Conseil du bien-fondé de cette initiative et surtout déterminer une politique culturelle. Le titulaire du département de la «Cohésion sociale» a l’été pour forger son discours. L’automne devrait être brûlant.