Parc parisien, le jardin de la cour du Maroc est aussi un peu genevois: la guirlande de lumière de la grande esplanade rappelle celle qui, à la nuit tombée, ourle la Rade. Les bancs dessinés par ADR architectes ont des jumeaux au bord du lac. Georges Descombes devient une figure familière et proche de ses concitoyens. Pour peu qu'ils aient flâné quelquefois dans le parc de Lancy. Ou s'ils se souviennent de la Voie suisse, événement majeur des festivités du 700e anniversaire de la Confédération et marque de l'histoire paysagère de ce pays. Ses interventions, d'abord perçues comme «expérimentales» ou «minimales», sont aussi discrètes que respectueuses du lieu et fortement ancrées dans sa vérité. Elles exigent un apprentissage du regard. Puis elles s'imposent avec la force de l'évidence.

Formé en architecture à Genève et à Londres, Georges Descombes se veut «architecte dans le paysage». Le jardin de la cour du Maroc doit beaucoup, manifestement, à «sa sensibilité topographique», selon l'expression d'une chercheuse américaine, Elissa Rosenberg. Le nouveau parc parisien ne s'est pas fortuitement posé sur son site tel quel. Il résulte d'une négociation qui prend en compte la géologie, l'histoire, les pratiques et les besoins de cet espace spécifique. Sans rien céder en termes d'ambition architecturale et paysagère, ses auteurs l'ont élaboré de manière qu'il puisse accepter des adaptations au fil du temps. Et ont voulu qu'il offre «prise aux usagers sur son évolution». Cette équation complexe trouve sa solution dans la simplicité. «De l'eau, du gravier, de l'herbe, des arbres, il n'en faut pas plus», énonce George Descombes.

Auteur (avec Julien Descombes et Herman Hertzberger) du Bijlmer Memorial, sur le site du crash d'un avion d'El Al à Amsterdam en 1992, enseignant en Suisse, aux Pays-Bas, aux Etats-Unis (Universités de Harvard et de Charlottesville), Georges Descombes s'est taillé une autorité internationale. Jusqu'à une époque toute récente, la fine fleur des théoriciens et architectes du paysage européens et américains affluaient à l'Institut d'architecture de l'Université de Genève où il enseignait avec Michel Corajoud et Sébastien Marot dans le troisième cycle Architecture et paysage. Y ont passés les plus célèbres, tels Gilles Clément, Gilles Tiberghien, Christine Dalnoky, Michel Desvigne. Cet acquis, précieux pour tout enseignement lié à l'environnement, a été balayé par le démantèlement de l'institut. Ce qui, vu de l'étranger, paraît inexplicable.