Les atouts de Paris+ par Art Basel, foire parisienne très suisse
Marché de l'art
AbonnéEn lieu et place de la FIAC, un nouveau rendez-vous d’art moderne et contemporain, géré par Art Basel, s’installe sur les bords de Seine ce mercredi. Son directeur, Clément Delépine, nous présente sa protégée

La foire est finie, vive la foire. Après deux ans d’absence de la FIAC, rendez-vous emblématique de l’art contemporain à Paris, le Grand Palais éphémère accueillera dès mercredi sa remplaçante, Paris+ par Art Basel. C’est à la suite d’un appel d’offres que cette dernière délogeait en janvier dernier l’enseigne française de son écrin historique. Et comme son nom l’indique, la nouvelle foire n’est autre qu’une branche d’Art Basel, propriété du groupe MCH – qui s’exporte déjà à Miami et Hongkong.
Et la nouvelle venue tient à marquer son territoire en accueillant, pendant quatre jours, 156 exposants venus de 30 pays. Le directeur de Paris+ par Art Basel, Clément Delépine, détaille ses forces et partis pris.
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Le Temps: En quoi cette nouvelle foire est-elle différente de la FIAC?
Clément Delépine: Paris+ par Art Basel demeure une foire d’art moderne et contemporain. Elle a la chance de pouvoir s’appuyer sur la puissance et la force de frappe d’Art Basel. Nous avons reçu un très grand nombre de candidatures: 600 pour 156 places. Il a donc fallu affiner les critères pour n’accueillir que les meilleurs projets. Le comité de sélection s’est réuni pendant toute une semaine de façon que la liste finale soit la plus juste possible.
Nous avons voulu faire la part belle à la scène française: 61 exposants ont un espace en France, soit 38% des galeries retenues. Du côté des galeries internationales, on observe l’arrivée d’importantes structures, dont les new-yorkaises Acquavella, Luhring Augustine et Peter Freeman, la berlinoise Michael Werner et l’anglaise Sadie Coles. La qualité des œuvres qu’elles vont exposer témoigne de la confiance qu’elles ont dans le marché français.
Le secteur Sites, qui propose des expositions hors les murs, a été élargi à la chapelle des Petits-Augustins de l’Ecole des beaux-arts de Paris. C’est ici qu’a été ouvert le premier musée de France en 1795. J’aimerais, dans les années à venir, élargir le dispositif au-delà de l’hypercentre pour faire découvrir aux étrangers des lieux qu’ils ne connaissent pas, tout en allant à la rencontre des publics qui ne fréquentent pas les lieux culturels. Par ailleurs, un programme de conférences, accessibles gratuitement et ouvertes à tous, a été mis en place. Paris+, c’est aussi une qualité de service incomparable. Le VIP service d’Art Basel regroupe 42 personnes à temps plein dont 35 réparties aux quatre coins du monde, contre 6 à la FIAC en 2021.
Les plus grands collectionneurs seront donc à Paris?
La force de frappe d’Art Basel tient à sa capacité à réunir les meilleures galeries qui ont à cœur de montrer leurs meilleures œuvres, attirant ainsi les plus grands collectionneurs.
Que signifie le «+» de Paris+ par Art Basel?
Au fondement du projet, il y a la volonté de créer un dialogue entre les industries créatives présentes sur les bords de Seine: design, cinéma, mode… Je suis très sensible à l’interdisciplinarité et souhaite confronter les arts visuels avec d’autres champs créatifs et faire ainsi de Paris+ une passerelle entre ces différents secteurs.
Qu’en est-il de l’équilibre entre art moderne et art contemporain? La sélection opérée semble nettement favoriser l’art contemporain.
Ce n’est pas un choix délibéré. Mais nous manquons cruellement de place au Grand Palais éphémère. Il y aura en effet, cette année, une plus large représentation de l’art contemporain par rapport à l’art moderne. Mais ce rapport tendra à s’équilibrer dans les années à venir.
Quid de la place des galeries émergentes?
Elles sont au nombre de 16 et présenteront des solo shows dans des espaces de 20 m2. Nous avons décidé de les réunir au centre de la foire et d’en faire ainsi son centre de gravité.
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Quelles seront les surprises de cette première édition de Paris+ sur les stands des galeries?
Le public pourra admirer notamment un bel ensemble de toiles de Robert Ryman des années 1960, une toile de Tom Wesselmann de 1965, une œuvre de James Turell, une grande pièce de Philippe Parreno, une très belle œuvre tardive de Joann Mitchell alors qu’une exposition lui est consacrée à la Fondation Vuitton, où elle dialogue avec Claude Monet. A noter également des œuvres d’Anri Sala, qu’on peut également retrouver à la Bourse de commerce. Des Picasso et des Magritte, côté art moderne, aux côtés d’œuvres comme celles de Tschabalala Self ou William Wegman pour le contemporain.
Qu’avez-vous prévu pour remotiver les collectionneurs touchés par le syndrome de «fair fatigue», cette lassitude face à la multiplication des événements sur le marché de l’art?
Ce syndrome a surtout été évoqué avant la crise du covid. Une foire est une plateforme commerciale mais aussi un événement social. La communauté des galeries et des collectionneurs est animée de la volonté de se retrouver. L’avenir n’est plus aux événements globalisés et standardisés. Il faut désormais s’ancrer dans un lieu. L’idée du «+» de Paris+ est de mettre l’accent sur ce qu’on peut offrir de plus à Paris que l’on ne propose pas à Bâle ou à Miami.
Comment envisagez-vous de réduire l’empreinte carbone de Paris+?
Le Groupe Art Basel est membre de la Climate Coalition, qui engage ses membres à réduire leurs émissions de 50% d’ici à 2030 en s’alignant sur l’Accord de Paris. Une réflexion a également été menée sur la réutilisation des cloisons qui ont un cycle de vie de sept ans. Les moquettes vont toutes être recyclées. Du côté des éclairages, nous sommes passés aux leds. Au total, 94% des matériaux utilisés seront recyclés. Un bilan carbone de la foire est en cours.
Paris va -t-elle éclipser Londres et devenir l’épicentre du marché de l’art européen?
Nous n’y sommes pas encore en termes de chiffres. Mais il y a un réel dynamisme parisien avec un alignement des planètes à un moment où le Royaume-Uni a fait le choix du repli. Celui-ci pénalise Londres et donne ainsi toutes ses chances à Paris, qui est très bien positionnée. Les fondations privées ont redynamisé le paysage institutionnel des bords de Seine. Un certain nombre de galeries, basées à Londres et qui ont souhaité conserver un accès au marché européen, se sont implantées à Paris, tout comme certaines galeries américaines. L’arrivée de galeries importantes témoigne d’une réelle confiance envers le marché français.
Paris+ par Art Basel. Grand Palais éphémère, du 20 au 23 octobre, parisplus.artbasel.com