A l’occasion de ses 20 ans, Le Temps propose sept explorations thématiques, sept causes. Durant l’été, nous nous intéressons au boom de créativité qui anime la Suisse depuis quelques années. Cette semaine, une série de portraits de programmateurs musicaux.

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La créativité suisse

Le Musée de l’Elysée a choisi de décliner sa huitième Nuit des images en trois parcours distincts. Une nouvelle dynamique qui permettra aux visiteurs de circuler à leur guise dans les jardins de l’institution. Les travaux de 40 photographes et artistes, suisses et internationaux, seront ainsi répartis selon leurs préoccupations. Entre animation photographique participative et annonce des huit nominés du Prix Elysée 2018, une nuit sera placée sous le signe de la découverte. La Nuit Littéraire mêlera de son côté les mots à l’image avec une création radiophonique ainsi que le traditionnel Salon du livre On Print. Le dernier parcours sera quant à lui consacré à l’humanitaire. Une thématique dans l’air du temps qui sera mise en perspective et en images par dix artistes locaux.

Cette Nuit Engagée sera l’occasion pour les visiteurs de redécouvrir des sujets d’actualité, mais de les regarder autrement tout en s’immergeant dans l’univers de l’humanitaire en échangeant avec ceux qui le construisent et le capturent. Projection de courts-métrages, table ronde et exposition dans une yourte sont au programme. L’objectif est d’aller au-delà de l’image, car l’engagement surpasse la simple participation. Cette notion nécessite une implication – comme le disait Jean-Paul Sartre, il s’agit de «se salir les mains».

Espace de réflexion

Conçue en partenariat avec l’Aide humanitaire suisse et le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, la Nuit Engagée laisse carte blanche à dix photographes. «Nous avons discuté de l’image médiatique de l’aide humanitaire. Nous nous sommes demandé comment la représenter sans passer par l’analyse médiatique ou des statistiques», explique Pascal Hufschmid, responsable du développement à l’Elysée et qui a mis sur pied le projet «Principes humanitaires, ici et maintenant». Les images de conflits, de crise, de guerre sont présentes quasi quotidiennement dans les journaux, à la télévision, sur les écrans des ordinateurs et des téléphones. Des supports que l’on peut fermer ou éteindre, alors que le musée offre un temps d’exposition plus long. «Nous sommes habitués aux images violentes, codifiées. Nous sommes aujourd’hui comme détachés face à ces images qui ne nous concernent pas, car prises loin de notre vie quotidienne. On entend, mais on n’écoute plus leurs messages.»

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Une tendance que le musée souhaite inverser. Les dix artistes romands sélectionnés abordent ces sujets d’actualité sous le prisme de l’ici et maintenant. L’aide humanitaire est fondée sur quatre principes: l’humanité, l’impartialité, la neutralité et l’indépendance. «Ils sont présents sur le terrain, comme sur le front en Syrie, mais aussi proche de nous, à Lausanne», souligne Pascal Hufschmid. Ces dix photographes interprètent, illustrent ces principes à une échelle locale et font ainsi réfléchir le visiteur sur son quotidien. Dix courts-métrages seront projetés à 22h30 lors de la table ronde. L’un après l’autre, ils ouvriront un débat sur l’actualité et ces principes humanitaires. Manuel Bessler, chef du Corps suisse d’aide humanitaire, et Philippe Stoll, du Comité international de la Croix-Rouge, seront présents aux côtés de deux photographes. L’idée est de transformer le musée en un espace de discussion, de réflexion, et aussi de confiance, afin de pousser les visiteurs à aller au-delà des images. «Nous proposons des pistes alternatives et accompagnons l’actualité avec des points de vue différents qui laissent place à l’émotion, résume Pascal Hufschmid. La photographie permet ce genre de rencontre, où chacun sort de sa zone de confort. Le visiteur se sent ainsi légitime et à même de réagir face à ces sujets d’actualité.»

Aider et dialoguer

Pour aller jusqu’au bout de l’exercice, le musée a construit une yourte – «une tente accueillante dans laquelle on se sent le bienvenu», souligne l’Elysée. A l’intérieur, quatre images prises par Matthias Bruggmann, le lauréat du Prix Elysée 2017, seront exposées. «Elles sont issues de son photoreportage sur le conflit syrien. L’objectif est de ralentir le regard porté sur ses photos et d’engager une conversation avec le photographe», détaille Pascal Hufschmid. Dans la soirée, lors des projections, ce sont des thèmes comme la déshumanisation ou la résilience qui seront à leur tour abordés. «Deux films feront écho à l’actualité, sur la question de la migration et de la crise qu’elle traverse, avec une certaine profondeur. Aider, c’est aussi garantir le dialogue avec toutes les partis prenantes, malgré la barrière de la langue et les différences culturelles. A travers eux, on s’aperçoit qu’il est déjà difficile de se comprendre ici et maintenant», souligne Pascal Hufschmid.

Deux autres films présenteront des situations sans issue: «On comprend alors que face à une impasse, on ne peut pas se cacher et aller de l’avant.» En guise de conclusion à cette Nuit Engagée, un film permettra aux visiteurs de se demander ce qu’ils peuvent faire à leur tour, ici et maintenant. Un film qui éloignera peu à peu le visiteur de Lausanne pour faire partie de quelque chose de plus grand. «C’est notre rôle de tester et d’essayer des choses. On ne prétend pas avoir les réponses, mais nous proposons des pistes de réflexion à ces problématiques.»


Nuit des images, Musée de l’Elysée, Lausanne, samedi 23 juin de 16h à 2h. Entrée libre.