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Bashung, l’enfant du rock est mort

Le chanteur français Alain Bashung est décédé samedi à l’âge de 61 ans. Depuis l’automne 2007, l’interprète de «Osez Joséphine» ou «Ma petite entreprise» était atteint d’un cancer des poumons.

Il était apparu sur la scène du Zénith, le 28 février dernier, lors de la cérémonie des Victoires de la musique, au cours de laquelle il avait remporté trois récompenses. Il était apparu, oui, solaire et sombre comme toujours, avec une dignité généreuse, hyper-classe, tape-dedans. Il était apparu... Et ce samedi soir, comme si l’on avait voulu se cacher l’inéluctable, comme si l’on pensait que ce genre de type est immortel, il a disparu. La nouvelle sème l’effroi chez ses admirateurs, si nombreux, sonnés, incrédules: Alain Bashung est mort samedi après-midi à l’hôpital Saint-Joseph à Paris, des suites de la maladie qui le rongeait.

Ces trois récents trophées (artiste masculin, album de chansons et tournée), immensément mérités, indiscutables jusqu’à l’os, avaient fait de Bashung l’artiste le plus titré des Victoires, avec onze récompenses depuis le début de sa carrière. «Je ne pourrai jamais oublier cette soirée. Merci, je vous embrasse tous, souhaitons-nous une année resplendissante…» avait-il déclaré devant un public debout. Et ajoutant, ému à nous faire trembler l’échine: «Vous m’avez tellement aidé.»

L’interprète de «Gaby», de «Vertiges de l’amour», de «Ma petite entreprise», le génie de «Fantaisie militaire», le chantre d’«Osez Joséphine», 61 ans, avait récemment dû annuler des concerts en raison de son état de santé. Depuis l’automne 2007, il était atteint de ce cancer du poumon qui a eu raison de lui, malgré toutes les chimiothérapies possibles et imaginables. Jusqu’au bout, il avait voulu faire de la scène, continuer à chanter, continuer à créer, continuer à nous secouer jusqu’au tréfonds.

Qualifié en 2008 de «dernier des géants» par l’hebdomadaire culturel «Les Inrockuptibles», Bashung occupait depuis longtemps une place de tout premier plan sur la scène dévastée de la chanson française. Un artiste à l’aura incommensurable, capable de séduire le grand public comme les amateurs éclairés. On le revoit, les yeux graves, sous de lourdes paupières, la raucité vocale et ce sens insensé du groove, de la note qui tape. Pour beaucoup: ados nous l’avons connu, adultes il nous a accompagnés. Toujours fidèle, éternellement grandiose. Le respect absolu, ceux qui l’aimaient n’auront jamais assez de mots.

Publiquement tout commence vraiment en 1979 avec «Roulette russe», un album très sombre, qui impose une sorte de new wave à la française. Une année plus tard sort le titre «Gaby», avec lequel Bashung connaît le succès, après pas mal de galères. Difficile de résumer, ensuite, cette carrière protéiforme, qui passe aussi par le cinéma, pour les réalisateurs Fernando Arrabal, Patrice Leconte ou, plus récemment, Samuel Benchetrit. Mais surtout, par des disques peu faciles d’accès, exigeants, inattendus. Qui vous claquent à l’oreille, comme l’audacieux «L’imprudence» (2002). Considéré comme l’un des plus réussis de Bashung, l’album était sorti en même temps que «Le Cantique des cantiques», enregistré avec Chloé Mons, artiste âgée de 28 ans à l’époque, qu’il avait épousée en juin 2001.

Avec son jean moulant, ses bottes de cow-boy, nul doute: Bashung était un enfant du rock. Né le 1er décembre 1947 d’un père inconnu et d’une mère ouvrière, il avait reçu une éducation catholique - il fut enfant de chœur! Il frayait déjà, tout jeune, avec Strauss, Wagner, Kurt Weill, Gene Vincent. «Bleu Pétrole», en 2008, avait marqué son retour aux guitares folk.