L'artiste n'a plus même besoin de placer l'œuf, ou quelque autre objet, réellement à la pointe de son échafaudage, sur l'arête entre deux vides, pour permettre au spectateur de visualiser ce concept premier d'un équilibre fragile, obtenu grâce à une juste distribution des forces. Non, il lui suffit de recourir à ces matières qu'il aime, le bois, le verre, la suie, à cette opposition entre «nature et architecture», entre taches informes et éléments géométriques, pour arriver à ses fins.
Inquiétudes cachées
En résultent des compositions très agréables à regarder, collages, installations qui émergent du mur, occupent l'espace, dans des tonalités elles aussi reposantes, du blanc au beige, jusqu'à l'or. Celui-ci a en effet fait son apparition dans l'œuvre, apportant sa brillance, sa chaleur, mais aussi son côté précieux. Manière une fois de plus de créer le contraste, d'insister sur la poésie qui résulte du hiatus entre le rêve le plus nuageux et l'idée la plus précise, entre le recul, l'élévation des pensées, et ces vérités crues qui vous rentrent dedans: «Je voudrais remonter à la surface, mes petites vérités sont toujours en train de monter. Mais qui aujourd'hui peut dire qu'il sait voler? [...] Chaque jour, ce processus est mis en péril», écrivait l'artiste en 1989. C'est dire si sous l'aspect soigné des pièces exposées, derrière l'équilibre effectivement atteint, se cachent les inquiétudes, un côté lunaire, nocturne, que le sculpteur ne laisse transparaître qu'en filigrane.
Fondation Louis Moret (chemin des Barrières 33, Martigny, tél. 027/722 23 47). Ma-di 14-18h. Jusqu'au 19 août.