Chargé aujourd’hui de faire vivre le château Mercier, ce pastiche médiéval qui domine Sierre, René-Pierre Antille a tout naturellement cherché à y implanter un événement à la hauteur de sa tentation orientale. Passionné mais raisonnable, il doute d’abord de sa crédibilité. Il lui faudra des échanges nourris avec des savants de la Fondation Bodmer et de l’Université de Fribourg pour se sentir assez légitime et lancer, en 2012, les premières Rencontres Orient-Occident. «Ces trois jours ont eu du succès, alors on a recommencé et étendu peu à peu la manifestation sur une semaine et demie», explique le jeune septuagénaire tandis que nous montons au donjon des Mercier, inauguré en 1908.
Comment se concocte un tel programme? «Comme le cuisinier qui joue l’instinct dans le dosage des ingrédients», répond le directeur. Des variations sur le dialogue des cultures, à défaut de thème plus précis. Avec sa complice Marie-Laure Sturm, coordinatrice des Rencontres, René-Pierre Antille cherche un équilibre entre conférences, débats, films, concerts et événements associant les étudiants de l’Ecole de commerce de Sierre.
Une confrontation potentiellement explosive
Au début, l’orientation était plus spirituelle, autour des trois grandes religions monothéistes. Puis, l’actualité aidant, la manifestation a évolué vers les questions de société. Aujourd’hui, elle traite de la place des femmes au Maghreb, des migrations ou, comme prévu cet automne, de l’hydro-diplomatie des grands fleuves. Peu à peu, un réseau d’intervenants s’est tissé. Le public? Il est Valaisan, Romand, cultivé, il a voyagé et il est sensible aux questions environnementales ainsi qu’à l’ouverture culturelle. «Je veille à ce que le programme soit accessible à tout le monde, mais nos rencontres restent un peu élitistes, il ne faut pas se le cacher», précise le responsable de l’événement.
Le sommet du donjon offre un magnifique point de vue sur Sierre et la Noble Contrée. L’ancienne résidence des industriels lausannois Mercier a été cédée par ses héritiers à l’Etat du Valais en 1991. Elle accueille depuis lors mariages, séminaires, concerts ou résidences d’artistes. Mais les Rencontres Orient-Occident (ROO) constituent le plus grand et le plus beau souci du directeur, par la lourdeur de leur organisation et de leur budget (200 000 francs).
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La 9e édition, qui devait s’ouvrir fin mai, a été reportée à fin octobre, début novembre. On espère que les invités prévus confirmeront leur venue. Ceux qui ne le pourront pas ne seront pas remplacés, les caisses du château Mercier ayant souffert du confinement. Cette confrontation entre Orient et Occident pourrait être explosive. Mais pas plus que les autres années elle ne mettra d’huile sur le feu. «Que l’islamisme assombrisse l’horizon du dialogue est une raison de plus pour persévérer dans notre approche, conclut René-Pierre Antille. Ce qui nous intéresse n’est pas d’inviter des intégristes des deux bords, mais des gens capables d’écoute et d’ouverture faisant avancer la réflexion. Nous sommes une poche de résistance au repli sur soi.»
Rens. sur Rencontres Orient-Occident