Pour son premier roman qui ne relève pas de l'autofiction, sur la couverture duquel elle apparaît cependant en gros plan tremblé, Christine Angot soigne l'aspect documentaire de son sujet, elle évoque des films de Chabrol, Sautet ou Chaplin, imagine un scénario inspiré d'un fait divers récent qui a passionné la France: la fille d'un grand acteur qui vient de se faire tabasser à mort par son amant après une fête trop arrosée. Mais elle change le lieu du drame et le nom des protagonistes, comme dans le cas de la grosse Lopez pour laquelle travaille François, «une espèce de monstre toujours habillée en noir, avec un blouson de cuir, qui devait peser cent kilos, et qui filmait à la hache. Et prétentieuse. Mais superpuissante, elle montait n'importe quelle production pour la télé avec tout l'argent qu'elle voulait.»
En dépit de ses négligences de style, Les Désaxés est un roman de facture plus classique que ceux qui l'ont précédé, et plutôt équilibré dans le partage des points de vue masculin et féminin. On n'y retrouve ni la violence (remplacée ici par la tristesse) ni le phrasé syncopé si caractéristique de L'Inceste, de Quitter la Ville ou de Pourquoi le Brésil? Du coup, l'intérêt du lecteur s'enlise quelque peu dans ce récit d'un naufrage annoncé, malgré l'effet de réalisme de ces disputes conjugales qui renvoie chacun à des expériences vécues.