Les cinéphiles les plus pointus y reconnaîtront surtout l'hommage détourné à un certain Reefer Madness, réalisé par l'obscur Louis J. Gasnier en 1936, une curiosité pudibonde qui avait été écrite par un groupe religieux extrémiste soucieux d'éloigner la jeunesse de la marie-jeanne. Andy Fickman, avec ses coauteurs Kevin Murphy et Dan Studney, en a d'abord tiré, il y a quelques années, une comédie musicale. Son succès à Los Angeles, puis off-Broadway à New York, a encouragé le trio à en tirer ce film, mise en abyme hilarante qui se déroule en 1936 lorsque, dans une petite ville américaine, un conférencier en croisade (Alan Cumming) présente le film de prévention à des parents d'élèves.
Reefer Madness version 2005 oscille donc entre la réaction des parents et les séquences outrancières du film qui leur est montré, plongée hallucinante de deux adolescents proprets dans l'enfer de la fumette. Et quel enfer: stupre, corruption, meurtres et même zombies dansants. «Ne fumez pas la moquette de la salle», prévient l'affiche. Un avertissement qu'Andy Fickman et sa bande n'ont manifestement pas suivi.
Encore que... Reefer Madness, excellente surprise, frappe d'abord par le soin apporté à la reconstitution des années 30 et par la qualité de la mise en images. Difficile de croire, après vision, qu'il s'agit en réalité d'un téléfilm, production de la chaîne Showtime qui, parallèlement à HBO (Palme d'or à Cannes pour Elephant), constitue l'un des derniers repères d'indépendance et d'originalité aux Etats-Unis. La télévision qui sauve le cinéma? On croit planer.
Reefer Madness, d'Andy Fickman (USA 2005), avec Alan Cumming, Kirsten Bell, Christian Campbell, Neve Campbell.