Un formidable patrimoine sonore
La fin des années 1950 ancre l’association, qui s’installe au 64 rue de la Serre. La salle de 250 places conçue par le Milanais Angelo Mangiarotti passe pour un chef-d’œuvre de l’architecture contemporaine. On y reçoit Sartre, qui répond à la question «A quoi servent les philosophes?» Il suffit du reste de quelques clics aujourd’hui pour écouter cette conférence. Comme toutes les autres depuis 1957, elle a été enregistrée puis numérisée sur le site internet du Club 44. Un formidable patrimoine sonore en libre accès.
A l’époque, le Club a la réputation d’être trop à gauche et le quotidien L’Impartial se livre à un pointilleux décompte des orateurs. On l’accuse aussi de parisianisme. «On ne peut trouver à Lausanne ou à Genève de quoi intéresser notre public 25 jeudis par an», rétorque Georges Braunschweig, qui a mandaté un recruteur pour attirer des conférenciers de poids.
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En 1984, au sortir de la crise horlogère, la famille fondatrice se retire, ce qui pousse le club à mettre en place un financement diversifié. C’est depuis cette époque que, tout en restant une association, il admet les non-membres à ses conférences contre l’achat d’un billet. «L’image d’un cénacle élitiste où l’on verse le champagne à gogo et des cachets mirobolants aux conférenciers n’a pas entièrement disparu, malgré tous les efforts d’ouverture», relate Marie Léa Zwahlen.
«Ceux qui croient que nous vivons de la main publique se trompent tout autant», ajoute-t-elle. Une subvention certes, mais aussi le sponsoring, les cotisations (180 francs) des 500 membres et les entrées (à 15 francs) des autres font tourner un budget d’un demi-million.
«Rajeunir notre public»
Le club a traversé les décennies, avec des hauts et des bas, mais fidèle à son ambition de départ. Celle qui lui a permis de rester, au cœur d’une «métropole horlogère» abonnée aux crises, un lieu d’échange reconnu en Suisse romande.
«Nous comptons sur l’imagination de Marie Léa Zwahlen et sur son ouverture aux problématiques nouvelles pour rajeunir notre public», note François Hainard, professeur de sociologie émérite et président du Club 44.
L’intéressée n’entend pas réinventer la roue, continuera d’accueillir un mélange de vedettes et de personnalités pertinentes moins connues. Les conférences sont courtes, pour favoriser le débat. Concerts, cinéma et galerie d’art complètent l’offre, «pour soutenir la culture comme un élément structurant de la communauté». Un projet: un cycle de réflexion d’un an sur la crise du Covid-19 et ses impacts, en collaboration avec le Centre culturel ABC et le Théâtre populaire romand (TPR). Reprise le 10 septembre.
A lire:
Club 44, questionner, débattre, rencontrer. Editions Alphil, 2019.
Site internet: club-44.ch