Ce Hamlet, mis en scène par Patrice Carier et Moshe Leiser en 1996 à Genève, remonté par Jean-Michel Criqui, valait-il une reprise? On peut en douter. C'est que le succès de l'opéra d'Ambroise Thomas repose sur un casting infaillible. Or Annick Massis déçoit. Sa devancière Natalie Dessay savait incarner la folie d'Ophélie. Elle n'a ni son charisme, ni le brillant vocal, en dépit d'un chant propre.
Jean-François Lapointe, en Hamlet, trouve peu à peu ses marques. D'abord engorgé, le baryton gagne en aplomb, jusqu'à développer un chant noble et souverain - aigus sensationnels. José Van Dam (Claudius), dont la voix n'est plus ce qu'elle était, se heurte à une tessiture trop basse. Mais la diction et sa ligne de chant demeurent exemplaires. Nadine Denize est stridente en Gertrude. Le ténor David Sotgiu, malgré son accent italien, campe un Laërte fin, touchant.
Ce sont surtout le chœur et un orchestre ductile à souhait (solos des vents!) qui captivent l'attention. Les remparts mobiles (décors assez lourds de Christian Fenouillat) définissent des espaces clos. Autant de portes infranchissables. La scène de la pantomime et les fossoyeurs creusant la tombe d'Ophélie à même le plateau du théâtre sont les deux moments forts d'un spectacle qui, s'il tourne le dos au faste du grand opéra français, n'exploite pas l'épure avec suffisamment d'imagination. Trop souvent, les gestes sont stéréotypés.
Hamlet. Grand Théâtre de Genève. Les 4, 6, 8 et 10 mars à 20 h. Di 12 mars à 17h. Loc. 022/418 31 30.