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Doutes et craintes pour l'avenir de la salle Métropole

L'Orchestre de chambre de Lausanne se voit confier la programmation et la gestion de la belle salle de concerts. Au nom de la rationalité financière. Sa multifonctionnalité sera-t-elle respectée?

Guy Studer, président du conseil de la Fondation Métropole, démissionne. L'homme qui s'est battu contre vents et marées, durant dix ans, pour assurer la rénovation et l'exploitation de la belle salle de concerts lausannoise, laisse une situation pratiquement assainie. Mais ce départ, certes programmé, survient dans un climat qu'on devine peu serein. Un bref communiqué en fournit la clef, qui annonce la décision du conseil de la Fondation de confier la gestion et l'administration de la salle Métropole à la Fondation Orchestre de chambre de Lausanne (OCL). Avec cette précision: la vocation du lieu, ouvert à tous les spectacles, toutes les musiques, tous les publics, demeure inchangée. Cette décision suscite pourtant doutes et inquiétudes chez plusieurs des premiers défenseurs de la salle, qui redoutent une mainmise de l'OCL. Par exemple, l'architecte Patrick Devanthéry, auteur de sa rénovation, qui rappelle les difficiles conditions de sa renaissance. «La salle Métropole a été sauvée grâce à sa multifonctionnalité. C'est dans cet esprit et en vue de cet objectif que nous l'avons restaurée et aménagée. Ce projet, il faut le maintenir vivant; il s'agit d'un devoir moral autant que d'un impératif de gestion.»

Appréciation identique chez le président démissionnaire qui voit une incohérence à confier la programmation et la gestion de la salle au principal utilisateur. «Je suis convaincu qu'un administrateur responsable de la salle Métropole se battra avec une autre énergie pour assurer son bon fonctionnement qu'un collaborateur de l'OCL, essentiellement préoccupé du confort et de la santé financière de sa propre institution.» Ce changement de cap n'émeut pas outre mesure le municipal Jean-Jacques Schilt, vice-président de la Fondation, chargé de l'intérim jusqu'à la nomination d'un successeur à Guy Studer. «A défaut d'une autre formule, tous les membres de notre conseil ont estimé qu'il valait la peine d'essayer la solution proposée par l'OCL.»

Pour l'orchestre, elle représente une économie de loyer; pour le Métropole, elle se traduit par des rentrées réduites d'autant. Mais, rappelle Jean-Jacques Schilt, le coût d'un intermédiaire – celui de l'exploitant actuel également démissionnaire – disparaît; la salle s'y retrouvera puisque l'OCL s'est engagé à garantir la location payée jusqu'ici. Y aurait-il conflit d'intérêts? S'agit-il d'une mainmise de l'OCL sur un lieu à l'acoustique remarquable, très utilisé par l'orchestre pour ses enregistrements et donc convoité? Pas du tout, répond le notaire Olivier Verrey, président de la Fondation OCL et membre du conseil de la Fondation Métropole, qui plaide lui aussi au nom de la rationalité. «En période de difficultés financières, la multiplication des institutions et des fondations peut s'avérer coûteuse. Ma solution est économiquement ingénieuse, facile à mettre en place et favorable aux deux maisons.»

Tandis que lui réfute la crainte d'une programmation et d'une gestion qui favoriserait l'OCL, Alain Faucherre, à la fois président de l'association Musique Métropole et secrétaire du conseil de la Fondation, ne cache pas ses réserves: «Je regrette les pressions exercées par l'OCL pour obtenir la gestion de la salle; je crains aussi une perte d'identité pour la salle. Et si jamais elle devient le local d'une institution, je m'y opposerai, comme je lutterai pour que la Fondation Métropole subsiste.»