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Des chevaliers avec smartphones

Sortie en DVD et diffusée par la RTS, «Person of Interest» conte le sauvetage de gens menacés grâce à un colossal système de traçage technologique. Un brin croquignolet, mais bien dans l’air du temps

Harold Finch, incarné par Michael Emerson. — © Warner/RTS
Harold Finch, incarné par Michael Emerson. — © Warner/RTS

Bien sûr, c’est un brin tiré par les cheveux. Harold Finch (incarné par Michael Emerson), qui a l’air d’un petit bureaucrate sans histoire, est un génie de l’informatique – en sus, devenu richissime. Au lendemain du 11 septembre 2001, il a développé un outil logiciel redoutable pour le gouvernement américain: agglomérant entre autres les données des caméras de surveillance, des écoutes de téléphones portables et des localisations GPS, sa «machine» permet de prévoir les crimes à venir, par les recoupements de millions de données. Problème: même surpuissant, ledit logiciel ne sait pas faire la différence entre une menace «pertinente», c’est-à-dire terroriste, et un banal meurtre à venir, visant des petites gens. Pétri de remords et mû par une raison cachée, Harold a quitté le service d’Etat pour s’occuper des affaires «non pertinentes». Il engage John (Jim Caviezel), ancien soldat devenu clochard, par brisure intime.

C’est le postulat de Person of Interest, que montre la RTS ces temps et dont la première saison est sortie en DVD. Autre pari de J. J. Abrams (Lost) comme producteur, après Alcatraz que j’évoquais ici le 20 juillet. Fidèle à sa troupe, celui-ci a amené l’excellent Michael Emerson, le Benjamin Linus de Lost, dans la distribution de cette série. Créée par Jonathan Nolan, frère de Christopher, Person of Interest semble se jouer de l’hyper-surveillance ambiante. Car le tandem Harold et John opère comme un aléatoire duo de sauveurs de la veuve et de l’orphelin, en détournant l’usage sécuritaire des technologies pour la cause des plus insignifiants des citoyens, ou presque. Dans une longue réplique programmatique durant le pilote, Harold lance: «Le public voulait être protégé mais ne voulait pas savoir comment.» Person of Interest base sa fiction sur le dévoilement de ce «comment»: le traçage absolu, à tout prix.

En ces temps d’accusations des écoutes internationales par la NSA, de condamnation partielle de Bradley Manning, et même de scandales domestiques – mi-juillet, les Américains apprenaient, sidérés, que plusieurs polices captent et gardent les données mouvantes des plaques de voitures –, Person of Interest devrait résonner. En fait, à trop vouloir embrasser leur thème avec leurs personnages de chevaliers à smartphones, ses concepteurs en font un divertissement sur la paranoïa contemporaine. Dans l’air du temps. Ni plus, ni moins.