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Il était une fois à Leningrad

Kirill Serebrennikov a électrisé la Croisette avec «Leto», un film virtuose racontant les débuts de deux pionniers du rock russe

«Leto» de Kirill Serebrennikov. — © DR
«Leto» de Kirill Serebrennikov. — © DR

Dix ans après avoir secoué le paysage musical anglo-saxon, le glam-rock devient pour la jeunesse soviétique synonyme d’émancipation et de liberté. L’heure n’est pas encore à la perestroïka, mais écouter Bowie, T-Rex et Lou Reed est déjà un acte rebelle. Deux ans après Le disciple, présenté à Cannes dans la section Un Certain Regard et qui lui a valu une première reconnaissance internationale, Kirill Serebrennikov accède à la compétition officielle avec Leto, qui se situe dans la Leningrad underground des années 1980. Le film y raconte les débuts de Mike Naumenko et Viktor Tsoï, leaders des groupes Zoopark et Kino, pionniers du rock russe.

Détours musicaux

Avant d’être réalisateur, Kirill Serebrennikov est metteur en scène de théâtre et dramaturge. Il y a dans sa manière de filmer les groupes et d’agencer les déplacements des personnages une virtuosité en totale adéquation avec les aspirations de Mike, Viktor et leurs amis. Dans un pur esprit punk, le cinéaste fait parfois dérailler son récit à travers des parenthèses en forme de clips, déjanté lorsque les passagers d’un train reprennent Psycho Killer (Talking Heads) ou désenchanté quand une femme abandonnée chante sous la pluie Perfect Day (Lou Reed).

Assigné à résidence, le réalisateur n’a pas pu venir défendre son film à Cannes. Il est accusé de détournements de subventions publiques, mais ne cesse de clamer son innocence. Avec Leto, il lance un appel à la jeunesse russe: ne laissez pas un régime annihiler vos rêves.