Comment passer en trois jours de l’abattement lié à une annulation au regain d’énergie dû à une réinvention? C’est ce qu’ont vécu à Genève les équipes du FIFDH (Festival du film et forum international sur les droits humains), dont la 18e édition devait se tenir du 6 au 15 mars. Au moment où la manifestation annonçait mercredi en fin de journée sa «programmation 2.0», Bruno Giussani, président du conseil de fondation, se disait en premier lieu impressionné par la manière volontaire et créative dont toutes les personnes travaillant pour le FIFDH se sont mobilisées afin d’éviter une suppression pure et simple du festival.

«Depuis deux semaines, nous suivions forcément de près l’évolution du coronavirus, explique Giussani. Mais c’est forcément vendredi dernier, lorsque le Conseil fédéral a dévoilé son ordonnance interdisant les rassemblements de plus de 1000 personnes, tout en renvoyant les organisateurs de manifestations plus petites aux autorités sanitaires cantonales pour l’évaluation des risques, que tout s’est accéléré. Car lorsque les deux salles de Pitoëff à Genève ainsi que le bar sont pleins, on avoisine les 950 festivaliers.» Les responsables du FIFDH ont alors planché sur trois réactions immédiates: diminuer la jauge des salles, appliquer et renforcer les mesures de précaution, établir un dialogue constant avec les autorités cantonales.

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Mais le lendemain, le canton de Berne allait plus loin que l’ordonnance fédérale en exigeant des organisateurs qu’ils connaissent l’identité de chaque participant et puissent garantir qu’aucun n’ait récemment séjourné dans un pays à risque. Si de telles mesures entraient en vigueur dans tout le pays, le FIFDH serait forcément en première ligne, avec ses invités en provenance d’une trentaine de pays et ses billets non nominatifs. Dans la foulée, sa directrice, Isabelle Gattiker, recevait dimanche un préavis négatif des autorités sanitaires. Après une dernière réunion de crise lundi matin, le FIFDH annonçait finalement en début d’après-midi l’annulation du festival… sans pour autant tirer un trait définitif sur sa 18e édition.

Caisse de résonance

«Comme notre but est de montrer des films, mais à travers cela de donner la voix à des activistes et des artistes, de dénoncer des abus et violations des droits humains, d’éclairer des réalités sociales et politiques et de proposer des solutions, nous ne pouvions nous résoudre à tout laisser tomber», raconte Bruno Giussani. C’est ainsi qu’après une mobilisation des équipes qui aura duré 48 heures le FIFDH est passé en mode 2.0., décidant notamment de maintenir ses différents jurys afin de pouvoir proposer le 15 mars, comme prévu, un palmarès complet. Sur le principe d’amener le festival au public plutôt que le contraire, plus de 15 débats et grands entretiens seront diffusés en streaming depuis un studio aménagé pour l’occasion, étant donné que plusieurs invités se rendront bien à Genève. Les internautes pourront poser leurs questions en direct.

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Côté cinéma, trois documentaires, dont Maisonneuve, à l’école du vivre ensemble, du Genevois Nicolas Wadimoff, seront diffusés sur les différents canaux de la RTS. D’autres films seront prochainement distribués dans les salles, tandis qu’une dizaine de festivals, de Visions du Réel au GIFF en passant par Locarno, ont offert d’héberger en deuxième partie d’année des projections de longs métrages qui devaient être dévoilés au FIFDH. Et avec l’autorisation du Département de l’instruction publique, les projections scolaires ont été maintenues.


Tous les liens et toutes les informations sur le programme 2.0 du FIFDH 2020 sont disponibles sur le site Fifdh.org