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Hilary Swank, une certaine idée du rêve américain

L’actrice américaine a reçu un Léopard d’honneur saluant sa carrière exemplaire. Lors de son passage au Tessin, elle a insisté sur l’importance de suivre son instinct et de travailler dur si on veut tenter d’accomplir ses rêves

Hilary Swank sur le tapis rouge du Locarno Festival, 9 août 2019. — © Urs Flueeler/Keystone
Hilary Swank sur le tapis rouge du Locarno Festival, 9 août 2019. — © Urs Flueeler/Keystone

On dit souvent que ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort. Hilary Swank en sait quelque chose, comme elle l’a expliqué lors de son passage au Locarno Festival, où elle a reçu un Leopard Club Award saluant une carrière d’actrice et de productrice faite de choix souvent audacieux. A la fin des années 1990, l’Américaine décroche un contrat de deux ans dans la série Beverly Hills 90210. Las, après une dizaine d’épisodes seulement, elle est licenciée.

Retrouvez ci-après notre dossier sur  le Festival de Locarno 2019

«J’avais été engagée pour les 8e et 9e saisons, mais rapidement le producteur, Aaron Spelling, me convoque et me dit: «Ça ne va pas marcher, on va vous laisser partir.» J’étais dévastée parce qu’on me considérait comme pas assez bonne, et surtout parce qu’on me considérait comme pas assez bonne pour un show que plus personne ne regardait – Luke Perry était déjà parti depuis longtemps… Mais deux mois après, on m’a proposé Boys Don’t Cry. Si j’étais restée dans Beverly Hills, je n’aurais jamais fait ce film. Quand une porte se ferme, d’autres s’ouvrent.» Lors de la masterclass publique qu’elle a donnée samedi matin au Locarno Festival, comme plus tard en conférence de presse, Hilary Swank répétera plusieurs fois qu’il est possible d’accomplir ce qu’on veut, pour autant qu’on travaille dur.

Deux Oscars

Adapté d’une histoire vraie, Boys Don’t Cry fera sensation par la manière dont Kimberly Peirce, qui signe alors son premier film, aborde la question de la transidentité, alors absente des débats de société. Dans la peau d’un jeune homme emprisonné dans un corps de femme, Hilary Swank est incroyable. Lorsqu’elle reçoit en 2000 l’Oscar de la meilleure actrice, personne n’est surpris. Comme lorsqu’à peine quatre ans plus tard elle remportera sa deuxième statuette pour son rôle de boxeuse dans Million Dollar Baby, de Clint Eastwood. Elle n’avait alors même pas 30 ans. «Faire ce que vous aimez est déjà une récompense en soi, tempère-t-elle. Vous savez, je n’ai jamais voulu être actrice pour gagner des prix. Mais c’est clair que remporter ces deux Oscars a été quelque chose d’incroyable; c’est une sensation que je ne saurais expliquer. Vous êtes assis dans cet auditorium au milieu des gens que vous admirez, et alors que vous avez toujours eu l’impression d’être une outsider, soudain on vous appelle sur scène et vous n’êtes pas prête à avoir autant de reconnaissance. Mais pour votre carrière, c’est génial. Sans mon premier Oscar, je n’aurais pas eu des opportunités aussi rapides.»

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Hilary Swank fait partie de ces personnalités qui incarnent une certaine idée du rêve américain. Si elle a toujours eu l’envie d’être actrice, elle n’a en effet suivi aucune école d’art dramatique, se contentant durant sa scolarité d’auditionner pour de petits spectacles. Comme l’université n’était pour ses parents pas une priorité, ceux-ci ne l’ont jamais dissuadée de tenter sa chance, même si elle aurait pu mener une carrière sportive – elle a un passé de nageuse et de gymnaste qui, pour certains rôles physiques, lui sera par la suite utile. Consciente que le milieu du showbiz peut s’avérer cruel, sa mère décidera même de l’accompagner à Los Angeles. Avant de dénicher un petit appartement, elles dorment toutes les deux dans leur voiture. Hilary court alors les castings et commence par de petits rôles dans des sitcoms. Au cinéma, elle apparaît en 1992 dans Buffy, tueuse de vampires.

Deux ans plus tard, elle obtient son premier rôle conséquent dans Miss Karaté Kid. «Ce film va faire de toi une star», prédit Jerry Weintraub. Face au public locarnais, elle prend une voix de stentor pour imiter le producteur, comme elle tentera ensuite une imitation de Clint Eastwood. Toujours est-il qu’elle devra encore attendre six ans avant de devenir une star. «Cela m’a permis de prendre conscience que le processus d’apprentissage est long. Je suis récompensée pour ma carrière alors que j’ai encore tant de choses à apprendre. J’ai très vite su qu’il ne faut jamais se reposer sur ses lauriers.»

Le rêve Eastwood

Suite au succès de Boys Don’t Cry, l’Américaine a toujours continué, tout en travaillant sous la direction de grands metteurs en scène comme Brian De Palma ou Christopher Nolan, d’accorder une attention particulière aux jeunes réalisateurs. Mais son expérience la plus intense restera probablement le tournage de Million Dollar Baby. «Clint est quelqu’un de très simple. Et ce qui est beau, avec les gens simples, c’est qu’ils vont directement au cœur du sujet lorsqu’ils racontent une histoire. Travailler avec lui et Morgan Freeman a été comme un rêve, d’autant plus que j’avais conscience que ce serait une des plus grandes expériences de ma carrière.»

Hilary Swank a incarné l’enseignante et militante pour les droits civiques Erin Gruwell (Ecrire pour exister, 2007) ou encore une jeune mère de famille décidant d’étudier le droit afin de faire sortir son frère de prison (Conviction, 2011). Elle aime les rôles engagés, tout en avouant un faible pour les comédies. Elle dit surtout que le cinéma n’est pas toute sa vie, qu’elle n’accepte un projet que si elle est intimement convaincue qu’elle doit le faire. Et que sa plus grande récompense restera toujours les retours du public, comme lorsque aujourd’hui encore des gens lui expliquent que Boys Don’t Cry les a sauvés en leur montrant qu’on pouvait être différent.