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«Maisonneuve, à l’école du vivre-ensemble», ou la richesse du multiculturalisme

En cette période de confinement, «Le Temps» propose chaque jour une (re)découverte culturelle. Aujourd’hui, un documentaire tourné dans un collège montréalais par le cinéaste genevois Nicolas Wadimoff

n/a — © Akka Films
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Sortie remarquée de L’Apollon de Gaza, un passionnant film-enquête conçu comme une parabole, nomination à la tête du département cinéma de la HEAD (Haute école d’art et de design de Genève): pour Nicolas Wadimoff, l’année 2019 fut faste. Mais pas question pour ce stakhanoviste des images en mouvement de lever le pied. En marge de son travail institutionnel, le cinéaste vient ainsi de dévoiler un nouveau documentaire, tourné à Montréal. Maisonneuve, à l’école du vivre ensemble, aurait dû connaître sa première suisse à l’enseigne du FIFDH (Festival du film et forum international sur les droits humains). A la suite de l’annulation de la manifestation, il est visible jusqu’à la mi-avril sur le site de la RTS.

Portrait: Nicolas Wadimoff a le doute chevillé au corps

Maisonneuve est un film qui fait du bien. Réalisé en collaboration avec la journaliste française Emmanuelle Walter, il a pour cadre le collège du même nom. Situé au nord-est de Montréal, Maisonneuve est un Cégep (Collège d’enseignement général et professionnel), un établissement faisant le lien entre l’enseignement secondaire et l'enseignement supérieur. Au début du film, on apprend que l’établissement, connu pour son éducation progressiste, a, il y a quelques années, défrayé la chronique à la suite de la tentative d’une dizaine d’élèves de rejoindre l’Etat islamique en Syrie. Que faire, dès lors, pour éviter que de tels événements ne se reproduisent? Et que faire, surtout, pour garder le lien avec des jeunes – ils sont environ 7000 – passant entre deux et trois ans à Maisonneuve à un âge où, souvent, on se cherche?

Pour la direction et le corps enseignant, le multiculturalisme et la tolérance sont des valeurs fondamentales qu’il faut cultiver. Ainsi, l’animateur socioculturel Erik Pirro, un des personnages récurrents du film, organise des stages de philo ou humanitaires, pousse les élèves à s’engager, à prendre conscience qu’ils doivent être acteurs de leur vie. Pour Malika Habel, directrice d’origine algérienne de Maisonneuve, il est inimaginable que des parents ayant fui des pays en proie à la montée d’un islam radical aient à affronter des enfants choisissant de faire le chemin inverse. Afin de s’assurer que sa volonté de garder le lien avec les étudiants soit plus qu’un vœu pieux, elle a fait appel à des «travailleurs de corridor»: Momo et Anouck ne sont pas des nettoyeurs, mais des travailleurs sociaux parlant avec les élèves, favorisant les échanges entre les communautés, mettant en place des groupes de discussion nécessaires à la notion de «vivre-ensemble» qui est au cœur de la mission que s’est donnée le collège.

Donnant la parole aussi bien aux jeunes qu’aux adultes, Maisonneuve, à l’école du vivre-ensemble parvient, en un peu plus d’une heure et demie, à aborder une multitude de thèmes (apprentissage de la démocratie, préjugés culturels, racisme, précarité, religion, homosexualité, etc.). Au final, le documentaire souligne cette évidence qu’on ne rappellera jamais assez: un dialogue constant entre les cultures, mais aussi les générations, est essentiel, garant d’une société saine.

«Maisonneuve, à l’école du vivre-ensemble», de Nicolas Wadimoff, en collaboration avec Emmanuelle Walter (Suisse, Canada, 2020), 1h34. Disponible jusqu’au 15 avril sur le site de la RTS.

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