Violence psychologique
Beautiful Boy, qui emprunte son titre à une berceuse composée par John Lennon, est un livre de David Scheff, journaliste à Rolling Stone. Un homme intelligent, ouvert, qui a connu les joies de la drogue récréative et se retrouve dépourvu quand l’abîme s’ouvre au cœur de sa famille. Enfin, derrière la caméra se trouve, ô surprise, Felix van Groeningen. Ce cinéaste de Gand connaît l’âme humaine, principalement dans son acception belge. Il l’a disséquée dans des films baignés de bière et de fraternité, aux clairs-obscurs breugheliens comme La merditude des choses, Alabama Monroe et Belgica. Débarqué aux Etats-Unis, il ne souscrit à aucun cliché hollywoodien.
Parallèlement à la déchéance morale, sociale et physique de Nic, My Beautiful Boy scrute les affres de David, miné par son impuissance. L’énergie qu’il met à sauver Nic met sa famille en péril, épuise sa femme tandis que son ex-femme, la mère de Nic, exige de lui qu’il fasse encore plus. Il finit par éprouver les limites de l’amour paternel. Le père qui dit «ça suffit», qui baisse les bras et renonce à tendre la main à la chair de sa chair, ce beautiful boy à la dérive, exprime une très grande violence psychologique et enfreint un tabou du cinéma américain toujours prompt à célébrer les liens insécables de la famille.
My Beautiful Boy (Beautiful Boy), de Felix van Groeningen (Etats-Unis, 2018), avec Steve Carell, Timothée Chalamet, Maura Tierney, Jack Dylan Grazer, 2h.