Les chaînes de TV américaines ne ménagent pas leurs efforts. Pour ressasser les mêmes interrogations. Jusqu’à la date anniversaire de vendredi prochain, 22 novembre, les programmes dédiés à John Fitzgerald Kennedy foisonneront. ABC a déjà commencé à l’antenne de son Good Morning America, CBS démarre ce samedi avec une rétrospective de ce demi-siècle. Le réseau public PBS a produit Cold Case JFK, une nouvelle investigation sur l’aspect balistique de l’assassinat de Dallas. CNN revient sur l’enquête de la Commission Warren, Fox News reposera les questions demeurées en suspens, etc. Le meurtre aux circonstances perpétuellement controversées alimente à nouveau la machine à images, laquelle revient toujours sur les mêmes; à commencer par le film amateur de Abraham Zapruder, cette séquence tremblante qui marque le trauma initial. Et la fin d’un âge d’or construit de manière collective.

On pourrait s’étonner qu’aucune série n’a abordé de front, sous le pavillon de la fiction, les événements de ce 22 novembre 1963. Pour le traitement sous l’aspect de l’hypothèse de l’appareil militaro-industriel, le long film d’Oliver Stone, JFK, a peut-être fait le vide d’air autour de lui. Et un réseau national n’aurait sans doute pas pris le risque d’une telle entreprise. En 2011, pourtant fort critiquée par les Kennedy eux-mêmes et éreintée par la critique, la mini-série The Kennedys, pas ratée mais trop gentille, s’en tenait avant tout à l’évocation du clan.

Toutefois, autant que le jeune président lui-même, le foisonnement de théories du complot fait partie de la culture américaine depuis trois décennies au moins. Dans des registres plus fantaisistes, les auteurs de feuilletons y ont puisé sans vergogne. On songe bien sûr à The X-Files , qui a, elle, fêté ses 20 ans, ou à de larges pans de 24 Heures chrono, dans lesquels la machination finissait par revenir en pleine face de la nation libre. Le remake de V ne manquait pas non plus d’allusions à de crapuleuses complicités en haut lieu; les auteurs y étaient d’ailleurs encouragés par la série originale, dont le propos, passé les lézards extraterrestres, était notoirement politique. Fringe trempe aussi dans cette atmosphère, de même que Person of Interest. Le succès de cette dernière, ainsi que le climat actuel de paranoïa des réseaux, devrait nourrir d’autres projets. Qui puiseront sans doute à nouveau, de manière indirecte, au drame d’il y a 50 ans, dans un pays pourtant peu avare en meurtres de présidents. Celui de Kennedy, que les ombres ne cessent de recouvrir dans la tremblante image de Zapruder, demeure fondateur.