«Nu», la série naturiste qui dévoile tout
Série
Entre comédie française et dystopie décalée, la nouvelle production d’OCS prend le parti de dénuder totalement ses acteurs. Une première mondiale effrontée, à découvrir cette semaine

Il faut imaginer la scène. Elle est délicieusement surréaliste: allongé sur son lit d’hôpital, un policier se réveille tout juste d’un interminable coma. Il y a huit ans, Franck s’est fait tirer dessus lors d’une intervention qui a mal tourné, le laissant inconscient. Si son corps est resté opérationnel grâce aux machines, le jeune homme doit désormais se reconnecter avec le monde qu’il a laissé… et qui a beaucoup changé depuis. C’est ce que lui révèlent son médecin et une infirmière, l’air préoccupé. Complètement nus.
L’exhibitionnisme aurait-il gagné le corps médical? Point du tout, la situation est tout à fait normale. Bienvenue en 2026! Franck apprend qu’après un important attentat terroriste cinq ans auparavant, la France a adopté la loi Transparence. Celle-ci proscrit, pour des raisons sécuritaires, tout usage de vêtements dans l’espace public. L’argumentaire? Sans habits, plus de moyens de dissimuler une arme et donc plus de délits. «Liberté, égalité, nudité», clame la devise. Sans rire.
Pour cause de réchauffement climatique, les températures se sont considérablement adoucies dans l’Hexagone. Ce qui permet à chacun de se balader dans le plus simple appareil, muni seulement de baskets et d’une banane transparente où ranger clés et téléphone portable. A noter que les impers transparents sont tolérés dans les cas de fortes pluies. Les blouses de chirurgien aussi, naturellement.
Naturaliste plus qu’érotique
C’est sur ce postulat totalement déjanté qu’est basée Nu, la nouvelle série d’OCS visible dès cette semaine en Suisse via le bouquet Teleclub. Un postulat déjanté et 100% assumé, avec des caméras qui anglent large et captent régulièrement les fesses, les seins et les sexes des acteurs et figurants.
«Tout le monde a déjà fait ce rêve dans lequel on sort tout nu dans la rue. J’ai voulu redonner aux spectateurs cette sensation étrange», nous raconte Olivier Fox, scénariste de Nu à qui l’on doit aussi la célèbre série Engrenages, sur Canal+.
Au départ, la vision de ces corps exposés est en réalité plus troublante qu’euphorisante. Attiré au «mauvais endroit», le regard du téléspectateur se sent gêné, voyeur. Et pourtant, au fil des épisodes d’une vingtaine de minutes chacun, on apprend à oublier un peu cet étalage de chair. Sûrement parce qu’elle n’est ni sexualisée ni érotisée, juste exhibée. «L’idée était de donner un côté naturaliste à la représentation du corps, de trouver la bonne distance pour qu’il se fonde dans le paysage», détaille Olivier Fox.
Foot sans maillot
Reste que la nudité se révèle un formidable ressort comique. Alors que Franck, dont la femme l’a entre-temps quitté, retourne vivre chez ses parents pour apprivoiser cette nouvelle réalité (ou, plutôt, refuse de s’y conformer), les scènes cocasses s’enchaînent. Cette salle d’attente, puis ce fitness où les gens s’activent en tenue d’Eve. Ce match de foot qui voit les joueurs, à défaut de maillots, courir avec leur numéro tatoué sur la peau. Les répliques font sourire aussi, comme celle du père de Franck qui, voyant son fils enfiler un t-shirt, l’apostrophe: «Tu ne vas pas sortir comme ça!» Sans oublier le casting qui compte quelques clowns de renom, à l’instar d’Alain Bouzigues (Caméra café).
Mais plus qu’une simple comédie, Nu mêle les genres. A commencer par le policier, lorsque le militant à l’origine de la loi Transparence est retrouvé mort tout habillé (outrage suprême!) et que Franck, de retour au poste, enquête sur l’affaire. Serait-ce là l’œuvre des «réfractaires», ces rebelles anti-naturisme qui taguent «on vous rhabillera» sur les murs du commissariat?
Des scènes d’enquête à la limite du grotesque, menées par des gendarmes vêtus de leurs seuls gilets pare-balles, auxquelles tenait particulièrement Olivier Fox: «J’en ai écrit tellement de ce genre, dans Engrenages notamment, que je me suis éclaté à les recréer de manière totalement décalée.»
Dictature molle
La série se veut aussi dystopique, dépeignant une France du futur dominée par les menus véganes, les écrans translucides et une invasion de la vie privée façon Big Brother. «J’appelle ça une dictature molle, souligne Olivier Fox. Acceptée de tous, parce qu’elle joue sur la bonne conscience, mais extrêmement brutale dans ce qu’elle propose.»
Ce grand écart entre commentaire politique et second degré ralentit toutefois le rythme de la série, dont le petit budget, couplé à un tournage express (moins d’un mois) et des dialogues convenus, lui donne parfois l’allure d’un mauvais téléfilm. Au final, Nu nous emballe bien moins pour son intrigue que pour son effeuillage, un défi culotté et joliment relevé qui vaut à lui seul le coup d’œil.
Nu, tous les jeudis à 21h35 sur OCS Go, via le bouquet Teleclub