On dit souvent qu’il est plus facile de faire pleurer que de faire rire. De fait, une mauvaise comédie sera toujours plus agaçante qu’un drame bancal. Est-ce par peur de se frotter à un genre populaire mais casse-gueule que le cinéma romand ne s’aventure ainsi que trop rarement sur le terrain de l’humour? Voici néanmoins qu’après Laurent Nègre (Opération Casablanca, 2011) et Mathieu Urfer (Pause, 2014), pour citer deux exemples à suivre, François-Christophe Marzal a lui aussi décidé, pour son troisième long métrage de fiction après Attention aux chiens (1998) et Au large de Bad Ragaz (2004), d’amuser plutôt que d’émouvoir.

Tambour battant est une comédie communautaire se déroulant dans le Valais du début des années 1970. Le village de Monchoux qui lui sert de cadre est fictif, mais l’histoire s’inspire d’une rivalité bien réelle entre deux fanfares qui a animé Chermignon dès le début du XXe siècle. Avec son coscénariste Nicolas Frey, Marzal a imaginé une opposition tant musicale qu’idéologique entre un ensemble tout ce qu’il y a de plus classique et dirigé mollement par Aloys, un vigneron aux valeurs bien ancrées à droite, et un groupe de frondeurs mené par Pierre, un musicien pop qui a fait carrière à Paris au moment de Mai 68. Alors que le Valais s’apprête à se prononcer sur le suffrage féminin puis sur l’initiative Schwarzenbach et son texte ouvertement xénophobe, Aloys le conservateur et Pierre le progressiste vont diviser Monchoux et ses habitants.

Le fond et la forme

Forcément, au moment où l’égalité hommes-femmes est au cœur des débats sociétaux et où l’UDC promet en cette année électorale de lutter contre une immigration qu’elle qualifie de «démesurée», le récit communautaire que met en scène Tambour battant renvoie finalement à des préoccupations actuelles loin d’être circonscrites au Valais, à la Suisse et même à l’Europe. Mais que serait le fond sans la forme? Au-delà de son excellent casting, le film convainc aussi par son montage extrêmement leste et sa photographie chaleureuse.


Tambour battant, de François-Christophe Marzal (Suisse, 2018), avec Pierre Mifsud, Pascal Demolon, Sabine Timoteo, Amélie Peterli, Roland Vouilloz, Jean-Luc Bideau, 1h30.