San Francisco, dortoir pour riches Blancs
Locarno Festival
Présenté en compétition, «The Last Black Man in San Francisco» raconte par la bande la mutation de la ville californienne

En 1967, San Francisco a vu naître le mouvement hippie. Les jeunes affluaient de partout vers le quartier emblématique de Haight-Ashbury pour prôner l’amour et la paix. «Si tu vas à San Francisco, sois sûr de mettre des fleurs dans tes cheveux», chantait Scott McKenzie. Ce morceau, on l’entend dans The Last Black Man in San Francisco, présenté en compétition au Locarno Festival après avoir été primé en début d’année à Sundance. Mais il est interprété a cappella par un Afro-Américain conscient que l’utopie hippie n’était qu’une brève parenthèse enchantée.
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San Francisco est ces vingt dernières années devenue le siège des entreprises les plus innovantes du monde. La ville a dès lors connu une gentrification extrême. Lorsqu’il était gamin, Jimmie Fails habitait avec sa famille élargie dans une maison victorienne dont on lui disait qu’elle avait été construite par son grand-père au sortir de la Deuxième Guerre mondiale. Cette demeure, les Fails n’ont pas pu la garder. Autrefois ville mixte et alternative, San Francisco est dorénavant un dortoir pour riches Blancs. Jimmie, à l’instar de la plupart des Noirs, vit très loin du «downtown Frisco».
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The Last Black Man in San Francisco raconte l’histoire de Jimmie, dont la seule obsession est de veiller sur la maison de son enfance, dernier vestige d’une communauté qui a implosé. Jimmie Fails y joue son propre rôle. Réalisé par son ami d’enfance Joe Talbot, le film déjoue magnifiquement les clichés du «drame racial» en usant d’un ton tragicomique et souvent décalé qui rappelle parfois les premiers essais de Spike Lee.