Les frères Taviani ont remporté une Palme d'or cannoise pour Padre padrone (1977) et un Ours d’or berlinois pour César doit mourir (2012). A Venise, c’est un Lion d’or d’honneur qu’ils se sont vu remettre en 1986, tandis que La nuit de San Lorenzo (1982), leur chef-d’œuvre, n’a obtenu que des accessits. Una questione privata est leur dix-neuvième long métrage, et aussi le dernier: Vittorio est décédé le 15 avril à l’âge de 88 ans, laissant seul Paolo, de deux ans son cadet.

Allusion à l'extrême droite rampante

L’histoire se déroule en 1943, dans les Alpes piémontaises. Milton a rejoint avec Giorgio les rangs des Partisans, qui combattent ce qui reste des chemises noires à la solde de Mussolini. Lorsque Giorgio est capturé, Milton est prêt à risquer sa vie pour le sauver. Parce qu’il le connaît depuis l’enfance, mais aussi parce qu’il a appris que son ami aurait été l’amant de Fulvia, la jeune fille qu’il aimait secrètement. La voilà, cette «questione privata»: Milton aimerait savoir si Giorgio et Fulvia se sont aimés.

Cette ultime réalisation des frères Taviani est étonnante dans sa manière de faire évoluer Milton dans une brume quasi constante, métaphore évidente de son trouble émotionnel. La mise en scène est d’une sobriété bienvenue, faisant de l’immensité de la montagne un territoire intime où résistants et fascistes se frôlent constamment – il y a là une évidente allusion à cette extrême droite rampante qui menace l’Italie et l’Europe. Il s’agit certes d’un film mineur, mais suffisamment inspiré dans sa forme comme dans sa construction narrative pour conclure honorablement une filmographie qui avait ces quinze dernières années été flottante.


Una questione privata, de Paolo & Vittorio Taviani (Italie, 2017), avec Luca Marinelli, Lorenzo Richelmy, Valentina Bellé, 1h25.