L’été classique au fil des petits festivals
classique
A l’ombre des gros festivals, ces manifestations ont leurs saveurs à elles. On y goûte le cachet des lieux et le contact avec les artistes

Comment faire son choix dans la jungle des festivals classiques de l’été? C’est très simple: si vous aimez les stars, précipitez-vous sur les mastodontes que sont le Verbier Festival, le Menuhin Festival Gstaad, le Lucerne Festival ou le Septembre musical. Mais il y a moyen de faire autrement: passer en revue les festivals de taille plus modeste et faire son marché avec perspicacité.
Ici, l’intimité est reine. Proximité avec les artistes, cachet des lieux (comme dans une église des Alpes), affiches aux saveurs insolites: autant de qualités pour se ressourcer à mille lieues du show off des gros festivals. Tour d’horizon (forcément subjectif) en sept destinations phares.
Festival de Bellerive
Bellerive ouvre la marche des festivals de l’été avec une affiche qui associe stars et talents en devenir. Ici, la campagne verdoyante aux abords de Genève et la vue plongeante sur le lac Léman prêtent un charme bucolique au festival. Lesley de Senger et son compagnon Gábor Takács-Nagy ont à cœur de faire connaître la relève des musiciens classiques. Si certains d’entre eux sont déjà au firmament, comme le Russe Daniil Trifonov (pour un récital et un concert avec orchestre, les 15 et 17 juillet), d’autres font leur entrée dans le monde ultra-sélect de la musique classique. On ira écouter les pianistes Fighin Collins, Nima Sarkechik, Julien Quentin et Louis Schwizgebel, le violoniste Kirill Troussow, le violoncelliste István Várdai, le Verbier Festival Chamber Orchestra mené par Gábor Takács-Nagy. (www.bellerive-festival.ch, du 9 au 17 juillet)
Festival des Haudères
Ceux qui fuient les stations huppées (Gstaad, Verbier et Zermatt) iront se repaître dans le val d’Hérens. François Grin, violoncelliste du Quatuor Terpsycordes, dirige le festival. Dans l’ambiance intimiste de la chapelle des Haudères, le Quatuor Terpsycordes (dans le monumental 15e Quatuor de Schubert, ve 2 août), Cédric Pescia et son épouse Nurit Stark (ve 9 août), mais aussi de jeunes talents comme le Français Lorenzo Soulès, sacré au dernier Concours de Genève, ou François-Xavier Poizat (avec le Quatuor Terpsycordes) célèbrent les vertus bienfaisantes de la musique de chambre. L’un des concerts assemble les archets des Terpsycordes et du Quatuor Sine Nomine dans l’irrésistible Octuor Opus 20 de Mendelssohn (di 4 août). (www.festivalhauderes.ch, du 2 au 10 août)
Jardins musicaux de Cernier
C’est le festival «anti-stars» par excellence. D’abord le décor: une grange tout en bois dans le village de Cernier, au Val-de-Ruz, mais aussi la Saline royale d’Arc-et-Senans (dans le Jura français) et le Parc régional Chasseral. Au camp de base, les concerts se déroulent à proximité des écuries et marchands de produits du terroir (la Fête la Terre). Ici, les musiques du XXe siècle ont toute latitude, de Cage à Grisey, en passant par Britten, Messiaen ou Chostakovitch. Mais on trouvera aussi des tubes comme la musique de scène Le Songe d’une nuit d’été de Mendelssohn ou Le Voyage d’hiver de Schubert dans l’orchestration de Hans Zender (avec le ténor Bernard Richter, ve 30 août et di 1er sept.). Le Quatuor Prazák (ve 23 août), Roger Muraro dans le Premier Livre de Préludes de Debussy (ma 27 août), Michel Portal et l’accordéoniste Vincent Peiriani (sa 31 août), Les Temps modernes de Chaplin accompagné «live» par l’Orchestre des Jardins musicaux, le spectacle Encore d’Eugénie Rebetez (sa 31 août): il y en a pour tous les goûts! Les concerts, à prix très abordable, méritent d’être regroupés. (www.jardinsmusicaux.ch, du 18 août au 1er sept.)
Piano à Saint-Ursanne
Une cité médiévale, un cloître où le piano est roi. Les concerts se donnent en plein air, à la lueur des bougies, dans le cloître de la collégiale. Pour ses dix ans, Piano à Saint-Ursanne déroule le fil rouge «Autour de la fantaisie». Le Russe Alexei Volodin place la barre très haut pour ouvrir le festival, avec les deux Rhapsodies de l’Opus 79 de Brahms, le Concert sans orchestre de Schumann et la 2e Sonate de Rachmaninov (ve 2 août). L’étoile montante Adam Laloum joue Brahms et Schubert (la grande Sonate D 959, ma 6 août).
Michel Dalberto, hôte régulier du festival, aborde l’envoûtante Sonate en sol majeur D 894 de Schubert (je 8 août). Patrick Poivre d’Arvor, en récitant, se met dans la peau de Guillaume A., jeune poète et éditorialiste français des années 1913-1914 sur fond de toile pianistique (sa 10 août). La musique de chambre (Dana Ciocarlie, Frédéric Rapin et le Quatuor Sine Nomine) et une «Nuit du concerto» étoffent l’affiche très attrayante. (www.crescendo-jura.ch, du 2 au 11 août)
Les Variations musicales de Tannay
Ici, le château de Tannay et son parc aux arbres centenaires (avec vue sur le lac!) font l’attrait du festival. Loin des «coups marketing» prisés par d’autres festivals, le président Serge Schmidt et Françoise de Courten misent sur la convivialité. Les Sœurs Labèque, qui n’ont pas pris une ride musicalement, ouvrent cette quatrième édition (di 25 août). David Greilsammer profite de la pause estivale pour dévoiler son nouveau programme Scarlatti-John Cage, passant en alternance d’un piano «traditionnel» à un piano préparé (me 28 août). Nicholas Angelich joue la carte du classicisme et du romantisme (sa 31 août). Jean-Guihen Queyras déploie son violoncelle leste et expressif dans le Concerto No 1 en ut majeur de Haydn avec l’Orchestre du festival, composé de musiciens de l’OSR et mené par Jonathan Haskell (di 1er sept.).(www.musicales-tannay.ch, du 25 août au 1er sept.)
Festival de l’Avenir
En Valais, dans la vallée de Conches, le Festival de l’Avenir investit l’église d’Ernen. Pas de stars bling-bling, mais une pléiade de chambristes dans des combinaisons multiples. Le directeur Fran-cesco Walter aime se donner un fil conducteur: cet été «la magie des chiffres» (ou nombres). La soprano Rachel Harnisch anime le volet baroque (me 31 juillet et ve 2 août). Michel Westphal, clarinette solo de l’OSR, joue le Concerto de Mozart pendant le volet de musique de chambre.( www.musikdorf.ch , du 6 juillet au 17 août).
Zermatt Festival
Zermatt offre les paysages les plus spectaculaires pour une évasion garantie. Deux semaines de concerts à la fin de l’été dans des églises pittoresques. Le Scharoun Ensemble, constitué de membres de l’Orchestre philharmonique de Berlin, forme le noyau dur du festival. Christian Zacharias donne le coup d’envoi dans le sublime 4e Concerto de Beethoven avec l’Orchestre de la Suisse italienne (ve 30 août). Le Genevois Fabrizio Chiovetta joue la crépusculaire Sonate D 960 de Schubert à l’Eglise anglaise (sa 31 août). Le duo formé de Stephan Genz et Michel Dalberto s’offre le Chant du cygne de Schubert à la chapelle de Riffelalp, perchée à 2222 mètres d’altitude (di 1er sept.)! On ira aussi écouter la soprano allemande Mojca Erdmann ou le violoncelliste allemand Nicolas Alstaedt, escortés des musiciens du Scharoun Ensemble (ve 13 et sa 14 sept). ( www.zermattfestival.com , du 30 août au 15 sept.)