Le personnage de Max-le-menteur a permis à Albert Simonin de faire une entrée en littérature qui lui ouvrira les portes du cinéma. En 1953, quand il sort le premier volume d'une trilogie dont Max est le héros, Simonin a 49 ans. Auparavant, il aura fait une tripotée de métiers, dont ceux de chauffeur de taxi et de journaliste, qui semblent faire partie du cursus obligatoire des auteurs de polars des deux côtés de l'Atlantique.

Albert Simonin est un enfant du faubourg parisien, celui de La Chapelle, qui était encore presque rural au début du XXe siècle. «La Chapelle de mes premières années était encore un village, et à l'instar des bourgades de province, le passage d'une automobile dans ses rues y déclenchait une intense émotion», dit-il dans un texte autobiographique.

Mais son destin et sa littérature seront intensément urbains. Avec un décor en grisaille, fait de boulevards, de carrefours, de «tractions» 11 légères (les Citroën), d'enseignes tapageuses aux frontons des boîtes de nuit qui portent des noms d'époque franco-américains, comme le Mystific de Touchez pas au grisbi. Avec le langage professionnel des truands, l'argot grâce auquel ils se reconnaissent et évitent d'être compris par les honnêtes gens.

Albert Simonin est l'inventeur d'un genre, le polar à la française, qui triomphera dans la deuxième partie des années 1950, en argot littéraire, en noir et blanc au cinéma, et en série tant il produira dans les deux secteurs. Un genre qui enfantera quelques chefs-d'œuvre comme les films de Jean-Pierre Melville, quelques nanars en couleurs à partir des années 1960. Et qui sera tourné en affectueuse dérision par George Lautner dans ses films, et par Frédéric Dard dans ses San-Antonio.