Genre: nouvelles
Qui ? Jérémie Gindre
Titre: On a eu du mal
Chez qui ? L’Olivier, 170 p.

Jérémie Gindre est plasticien et écrivain. Il est tantôt plus l’un ou plus l’autre ou les deux en même temps mais toujours il raconte des histoires. Diplômé de la Haute Ecole d’art et de design de Genève, il a effectué en 2011 une résidence «Artist in Lab», artiste en laboratoire, au Centre interfacultaire en sciences affectives et au Centre interfacultaire de neurosciences de l’Université de Genève. A partir des domaines étudiés par les chercheurs, Jérémie Gindre a élaboré cinq nouvelles réunies sous le titre On a eu du mal. Au cœur des récits, une expérience sensorielle, une émotion, une étrangeté dans la perception. A chaque fois, les personnages, les situations, les dialogues sonnent juste.

La première nouvelle, «Variétés des passions», se déroule sur l’échiquier particulier qu’est le terrain d’un camping. L’espace est divisé en cases et en castes. Les camping-cars se situent sur les meilleurs emplacements. Les tentes sont reléguées à la périphérie. Les parents de Paul persistent à camper sous la tente. Le garçon de 12 ans prend conscience cet été-là «combien sa famille est à la traîne des réalités». Tandis que chacun vaque à ses passions aussi petites soient-elles, Paul se noue d’amitié avec un garçon dont les parents, eux, logent dans un camping-car suréquipé, un autre monde.

Mélanie Gillioz, dans «Et tout casser», éprouve et dépasse ses limites après un licenciement pour faute professionnelle.

Autre expérience extrême, celle vécue par François. Il faisait une sieste dans une dameuse quand il est réveillé par des cris. Toutes les vitres de l’engin donnent sur du blanc: «L’avalanche a tout bouché d’un store blême.» «Moitié moins» suit les pas de Claude qui s’élance dans un jogging malgré l’héminégligence qu’il subit depuis son accident. Il «néglige» tout ce qui se présente sur sa gauche.

Jérémie Gindre aurait pu choisir le récit à la première personne pour décrire de l’intérieur ces décalages de perception. C’est un narrateur qui fait l’intercesseur avec le lecteur. Ce choix apporte une tension supplémentaire, un regard sur le décalage, un jeu entre ce qui paraît la norme et ce qui ne l’est pas.