«Connaître sa famille, c’est en apprendre davantage sur soi», écrit Gordana Kuić en exergue de Parfum de pluie sur les Balkans, roman-chronique-récit dans lequel l’Histoire, celle des hommes, des pays et des empires, se dessine en arrière-plan de l’histoire personnelle. Tout au long de cette narration, qui s’étend de 1914 à 1944, depuis «le coup de feu à Sarajevo qui résonna à travers toute l’Europe» jusqu’à la libération de Belgrade, se fait entendre une voix pleine de chaleur et de sensualité. Cette voix remonte par échos aux temps des Ottomans en Serbie et en Bosnie et à ceux de l’Edit d’Isabelle la Catholique qui poussa sur ces rivages les Juifs séfarades. Elle passe par les arcanes et les volutes de la mémoire, à travers le timbre de la langue ladino, cette forme de castillan qu’ont continué à parler les exilés du royaume d’Espagne pendant cinq siècles, jusque sur les rives du Bosphore.