Roman
Connu pour son parcours académique, le psychiatre lausannois devient conteur dans Marc de café, une saga familiale servie en 27 nouvelles chatoyantes

Bien connu pour son parcours médical et académique, le psychiatre lausannois Gérard Salem devient romancier à près de 70 ans, marchant ainsi sur les traces de sa sœur Gemma et de son frère Gilbert. A force d’entendre les autres faire récit de leur existence, il importe peut-être de ne pas perdre sa voix. Gérard Salem trouve sa voix de conteur dans une langue chatoyante et élégante.
En une suite de vingt-sept nouvelles s’enchaînant les unes aux autres comme autant de perles sur le même fil, composant une sorte de roman, l’auteur embarque le lecteur entre Orient et Occident. C’est une saga familiale courant sur un siècle, de 1915 à 2015, faite d’allers et retours narratifs, et portant sur quatre générations. Eclairé par la douce lumière nostalgique des souvenirs d’enfance, l’Orient de Gérard Salem apparaît complexe et enchanteur, assez éloigné des turpitudes actuelles. L’écriture porte cette saveur, toute de rondeur et de générosité, et épouse souvent le ton familier de la confidence, comme si l’auteur écrivait au coin du feu.
Né d’une mère assyro-chaldéenne et d’un père chrétien maronite, dans une famille riche et cultivée, l’auteur se promène sur ces deux branches familiales et en ressuscite quelques figures attachantes. Il n’élude pas pour autant quelques pages sombres, notamment des massacres de chrétiens d’Orient. Sans jamais rompre le charme coloré de cette suite de tableaux, comprenant aussi des scènes vaudoises et neuchâteloises, quelques fortes pages bousculent un peu le doux confort narratif de ce «Marc de café». Comme cette poignante scène d’un pique-nique de nantis qu’observent quelques familles pauvres, à l’affût de restes éventuels. Ou encore comme un hallucinant dialogue de naufragés au goût très contemporain, voix essoufflées que Gérard Salem saisit dans un clapotis des vagues.
Roman
Gérard Salem
Marc de café
L’Age d’Homme, 220 p.
3 étoiles