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Dans l'enfer d'une école islandaise

Le premier polar d’Arnaldur Indridason paraît enfin en français. «Les fils de la poussière» se révèle un très bon roman qui ravira les fans du célèbre commissaire Erlendur

Image d'illustration: paysage islandais. — © Boy Anupong/Getty Images
Image d'illustration: paysage islandais. — © Boy Anupong/Getty Images

En septembre, le Seuil publiait Le dynamiteur, le tout premier roman de Henning Mankell, paru quarante-cinq ans plus tôt. Et voilà que les Editions Métailié nous offrent à leur tour le premier polar d’Arnaldur Indridason, Les fils de la poussière, qui date de 1997. Un hasard, sans doute, mais heureux, car on ressort de la lecture de ces deux ouvrages ébouriffé et bluffé. Pas de doute, en tout cas, le grand Suédois comme l’Islandais n’ont pas attendu leur énième livre pour avoir du talent.

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Inaugural, le roman d’Arnaldur Indridason l’est à plus d’un titre. Tout d’abord parce qu’il crée, de toutes pièces, ce qu’on appelle aujourd’hui le polar islandais. Fondateur, il l’est aussi parce qu’il correspond à la première apparition du fameux commissaire Erlendur Sveinsson, que l’on retrouvera, à différents moments de sa carrière et de sa vie, dans une dizaine de romans. L’Erlendur de ce premier livre n’est peut-être pas aussi complexe qu’il le deviendra par la suite. Il se révèle toutefois d’emblée singulier, intègre et attachant. Divorcé avec deux grands enfants qui lui causent par mal de souci, il a déjà, écrit l’auteur, «une longue carrière dans la police, bien plus longue que ses supérieurs». Une situation pas toujours confortable, qui le rend particulièrement intransigeant et parfois tranchant.

Capsules frelatées

Il faut dire que la police manque de pistes pour dénouer les fils d’une étrange coïncidence. Alors que Daniel, un quadragénaire interné dans un hôpital psychiatrique, se jette par la fenêtre sous les yeux de son frère, son ancien professeur Halldor Svavarsson est assassiné, brûlé vif dans sa propre maison. Or il se trouve que l’enseignant retraité avait récemment rendu visite à son ancien élève. Et qu’il était pédophile. Que s’étaient-ils dit qui avait à ce point bouleversé Daniel? Et que contenaient en réalité ces capsules d’huile de foie de morue qu’il leur distribuait quotidiennement et qui pourraient bien être responsables de l’addiction ou de la mort prématurée de la plupart des garçons de cette volée?

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Au fil de deux enquêtes parallèles qui s’entremêlent – celle de Palmi, le frère de Daniel, et celle d’Erlendur – Indridason nous emmène avec habileté et nuance sur le terrain mouvant de ses obsessions. Dans Les fils de la poussière, outre la singularité de la lumière et du paysage islandais, on retrouve les grands thèmes de ses livres à venir, l’importance de la mémoire et le poids du passé, la perte des repères et des valeurs liée à un prétendu progrès, l’exploitation des plus faibles et les effroyables dérives de la manipulation de l’homme par l’homme.

© Métailié
© Métailié

Arnaldur Indridason, «Les fils de la poussière», traduit de l’islandais par Eric Boury, Métailié, 292 p.