«Oh…», de Philippe Djian
Roman
Suivre ou ne pas suivre l’écrivain dans les méandres d’une famille abracadabrantesque
Je ne voudrais pas vexer les fanatiques de Philippe Djian. Je connais des gens très bien qui l’aiment énormément. Mais, de mon côté, j’ai beau essayer, je n’y arrive pas. On me dit que c’est abracadabrant, mais qu’on y croit malgré tout. Eh bien, non, hélas, je n’y crois pas.
J’ai beau essayer de sympathiser avec cette femme sauvagement violée qui finit par tomber amoureuse de son violeur, je n’y parviens pas. Pourtant, j’essaye de débusquer la féministe en elle. Mais, même si l’on me dit que c’est une femme moderne qui mène sa vie tambour battant, je ne parviens pas vraiment à me convaincre. Je patine encore lorsque l’écrivain m’explique que son fils a une petite amie enceinte, mais pas de lui, et qu’il s’accroche désespérément au futur bébé… Et je décroche tout à fait lorsque je lis que le père de la femme violée – mais qui aime finalement son violeur, lequel n’est autre que son «charmant» voisin, façon Docteur Jekyll et Mister Hyde – est en fait un serial killer de la pire espèce. Un homme dont l’acte inqualifiable jeta jadis l’opprobre sur toute une famille. Si bien que la mère, de la susdite femme violée mais amoureuse, mère d’un fils papa poule et fille d’un serial killer – ouf! –, se sent obligée de se déguiser en jeunette et de sortir avec des jeunes gens de vingt ans de moins qu’elle! Etc.
Une chose me plaît néanmoins dans ce roman de Philippe Djian, c’est «Oh…», un titre, culotté, drôle et bref, avec une graphie taillée sur mesure pour l’écrivain.
Il me semble aussi que son écriture, qui avait tendance à s’amollir comme un vieux blouson de cuir usé, reprend ici du service, plus serrée, plus tendue, plus percutante et assez libre. Bref. Pour les amateurs de Philippe Djian, pour ceux qui y croient, ce roman, qui, une fois n’est pas coutume, sort à temps pour les prix littéraires de l’automne, est certainement un bon cru.