C’est la saison des prix littéraires, avec les prix Goncourt et Renaudot décernés ce mardi 3 novembre à Paris. Mais un acteur inattendu s’est invité à la fête: Amazon. Le 19 octobre, le géant américain du commerce en ligne a lancé en grande pompe son propre prix littéraire qui récompense un auteur autoédité, c’est-à-dire non rattaché une maison d’édition, présent sur le site du vendeur en ligne.

40 000 euros de droits d’auteur

Ce premier prix Amazon de l’autoédition a été attribué à Amélie Antoine, auteure du thriller psychologique «Fidèle au poste» par un jury présidé par le comédien Laurent Deutsch. La lauréate, inconnue du grand public, a reçu 5 000 euros et va bénéficier d’un dispositif marketing sur le site français d’Amazon valorisé à près de 15 000 euros.

Depuis la sortie de l’ouvrage en mars 2015, elle a récolté 40 000 euros de droits d’auteur. Ce succès fulgurant lui a permis de signer un contrat avec les éditions Michel Lafon. Amazon accueille à bras ouverts ces nouvelles plumes, plus ou moins talentueuses. Par le biais de sa plate-forme numérique, elle espère fabriquer les best-sellers de demain. Le premier tome de «Cinquante nuances de Grey», écrit par E. L. James, a été publié en autoédition avant de séduire des millions de lecteurs en librairie.

La fin des intermédiaires

L’entreprise aux 80 milliards de dollars de chiffre d’affaires, dont 22% dans le livre, s’est dotée d’un service dédié nommé Kindle Direct Publishing. Fini le démarchage hasardeux auprès des maisons d’édition: en quelques clics, le manuscrit est disponible en ligne à la vente sur Amazon.

Mais la gloire n’est pas automatique. Sébastien Bailly, auteur d’un ouvrage jeunesse, en a fait l’amère expérience. «J’ai écrit un roman «Eno, la chasse aux rastacs». Mais je n’ai pas fait fortune sur Amazon. Pire, je suis tombé si bas dans les classements de vente que je découvre à quel point le catalogue est profond», raconte-t-il sur son blog. Sébastien Bailly compte retirer son œuvre d’Amazon en novembre et démarcher des éditeurs pour lui donner une seconde chance.

Les données plus précieuses que les ventes

Impossible d’avoir des chiffres sur l’offre disponible. Interrogé sur le plateau de BFM Business le 6 octobre, Eric Bergaglia, responsable de l’opération pour Amazon France, assure que «des centaines de milliers d’auteurs» opteraient pour le service de son entreprise. L’offre est cependant pléthorique et la qualité des ouvrages variable. Mais les revenus générés par ces ouvrages numériques d’un nouveau genre sont infimes pour l’entreprise qui les héberge.

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Les ventes d’e-pub représentent seulement 4% du marché du livre dans les pays francophones, rappelle Gabriel de Montmollin, président de Labor et Fides dans une analyse publiée par L’Hebdo. Sans compter que les ouvrages propulsés par les maisons d’édition s’accaparent toujours les premières places du top 100 des ventes d’Amazon. L’entreprise de commerce en ligne mise plutôt sur les retombées indirectes. En créant une vaste communauté d’internautes autour des manuscrits autoédités, elle accède aux préférences de lecture et aux logiques d’achat de ses utilisateurs. Des données qui ont, elles, une forte valeur ajoutée.