Bande-dessinée
Le dessinateur de 44 ans, est notamment l’auteur de la série «L’Arabe du futur», qui s’est vendue à plus de trois millions d’exemplaires dans le monde

Riad Sattouf a remporté mercredi le Grand Prix au Festival d’Angoulême, plus haute récompense du monde de la bande dessinée. Le dessinateur franco-syrien de 44 ans, élu par ses pairs auteurs de BD à l’occasion de la 50e édition du célèbre festival, a reçu la distinction lors de la cérémonie d’ouverture au Théâtre d’Angoulême. «C’est très impressionnant», a-t-il déclaré après une ovation debout. Il a rendu hommage à sa grand-mère maternelle, la première qui a cru en son talent. «J’ai voulu faire une bande dessinée en imaginant qu’elle voudrait la lire, elle qui n’aimait pas ça», a-t-il expliqué au sujet de L’Arabe du futur, sa série autobiographique en six tomes.
«Je suis profondément honoré et ému (…) C’est la pièce maîtresse qui manquait en haut de la pyramide de mon ego», a-t-il plaisanté. «Faites des livres, et encore des livres. D’ailleurs c’est ce que je vais faire moi aussi».
Des millions d’albums vendus
Riad Sattouf a devancé deux femmes. Pour la Française Catherine Meurisse, c’est la quatrième fois consécutive qu’elle est battue en finale. Elle peut se consoler avec son entrée à l’Académie des Beaux-Arts en novembre. L’Américaine Alison Bechdel avait quant à elle reçu une forme de reconnaissance, moins visible mais plus rare, quand Les Secrets de la force surhumaine avait été retenu par le prix Médicis dans sa première sélection en littérature étrangère en septembre.
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Difficile de rivaliser avec la cote d’amour dont bénéficie Riad Sattouf au sein du milieu de la BD. Et sa légitimité artistique ne fait de doute pour personne. L’Arabe du futur s’est vendue à plus de trois millions d’exemplaires dans le monde. Cette série, traduite dans plus de 20 langues, a trouvé un succès international. Le tome 6, est sorti le 22 novembre 2022.
L’oeuvre du Franco-Syrien ne saurait être résumée à ce récit touchant et drôle des vicissitudes et doutes d’un enfant et adolescent doué avec un crayon, mais moins pour le reste. Il dessine aussi la vie d’une jeune Parisienne d’aujourd’hui, depuis ses 10 ans, dans Les Cahiers d’Esther (7 tomes depuis 2016), et s’est lancé dans celle du comédien français Vincent Lacoste (Le Jeune Acteur, 1 tome pour l’instant). Riad Sattouf, cinéaste, avait lancé la carrière de l’acteur avec un rôle dans son film Les Beaux Gosses (2009), puis dans Jacky au royaume des filles (2014). Riad Sattouf prépare aujourd’hui un troisième film.
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«Je ne fais rien d’autre que ça»
En 2010 et 2015, il avait remporté le Fauve d’or au Festival d’Angoulême, prix du meilleur album de l’année. Ce perfectionniste a poussé jusqu’au bout la logique en devenant son propre éditeur. Il a fondé en 2021 Les Livres du futur, maison où il est pour l’instant le seul auteur. Mais «je suis avant tout auteur de bande dessinée. Je ne fais rien d’autre que ça», expliquait-il en novembre.
Le Grand Prix de la Ville d’Angoulême est remis depuis 1974, avec à son palmarès tous les grands noms de la bande dessinée, particulièrement franco-belge, mais aussi les Suisses Zep et Cosey. Le palmarès ne s’est que peu ouvert aux autres continents, en primant quelques auteurs venus des Etats-Unis et du Japon, malgré la forte tradition de bande dessinée dans ces pays.
Une interview de Riad Sattouf en 2018: «Avant d’être Syrien ou Français, je suis dessinateur»
En 2022, c’est la Canadienne Julie Doucet qui avait été récompensée. Comme le veut la tradition, elle a remis le Grand Prix à son successeur, et une exposition lui est consacrée lors de ce Festival.
Le Festival accueille les meilleures années près de 200 000 visiteurs. Mais il doit se relancer après une édition 2021 annulée et une édition 2022 qui avait eu moins de succès en étant reportée en mars. En difficulté économique, le Festival a par ailleurs dû annuler une exposition consacrée à l’auteur Bastien Vivès, contesté pour des propos misogynes passés et des oeuvres mêlant mineurs et pornographie.