Né en 1969, à Burgos, en Espagne, Diego Queimada-Diez a travaillé aux côtés de Ken Loach (Land and Freedom, Carla’s Song) et tenu la caméra sur 21 Grammes. En 2003, il a vécu au Mexique près d’une voie de chemin de fer. Tous les jours, une centaine de migrants passaient par là. Il recueillait leurs récits, leurs rêves et les terribles épreuves qu’ils avaient vécues. Certains lui disaient: «Racontez à tout le monde ce qui nous est arrivé.»

Riche de quelque 600 témoignages, le réalisateur a finalement opté pour la fiction: «Je préfère prendre les éléments de plusieurs histoires pour créer un récit plus dramatique. Le film doit être un miroir dans lequel nous observons la réalité du monde.»

Juan, Sara et Samuel, 15 ans, prennent la route pour tenter leur chance aux Etats-Unis. En traversant le Mexique, ils rencontrent Chauk, un Indien tzotzil qui ne parle pas espagnol. Les adolescents se battent pour survivre, boire, manger, échapper à la police, aux racketteurs, aux bandits, aux violeurs…

Rêves d’or s’ancre dans la réalité. Le tournage s’est déroulé de façon chronologique; villageois et migrants tiennent leur propre rôle. Pour trouver les personnages principaux, le cinéaste est allé dans les quartiers les plus pauvres et les plus violents de Guatemala City. Grâce à des organisations qui aident les jeunes défavorisés à s’exprimer à travers des activités artistiques, il est entré en contact avec des danseurs de hip-hop, des graffiteurs, des acteurs de rue… Entre le Guatemala et le Chiapas, il a vu 6000 jeunes avant de trouver ses personnages.

Rêves d’or se termine en Californie, mais pas par un happy end hollywoodien. Dans le désert, on fait des cartons sur les enfants montés du sud. Qui est derrière le fusil? «Des vigiles, des fascistes défendant leur territoire. Sur le plan symbolique, c’est une façon de rappeler que les Etats-Unis sont le pays le plus violent du monde, le plus gros producteur d’armes. Leur politique est meurtrière pour les migrants. Ils vendent des armes, la frontière se militarise, le crime organisé se développe.»

Flocons de neige

Seul rescapé du voyage, Samuel finit en balayant les déchets carnés d’un abattoir. Le voyage valait-il la peine? Le no future guatémaltèque est-il pire que l’esclavage états-unien? Diego Queimada-Diez distingue deux voyages, un extérieur, un intérieur. «Dans le premier, les Etats-Unis se révèlent un piège. Dans le second, les personnages, apprennent que le paradis ne se trouve ni aux Etats-Unis, ni en Europe ou ailleurs. Ils doivent trouver cet endroit en eux.»

Des flocons de neige tombent derrière les paupières closes de Chauk et c’est sous la neige que se termine le film. Quel sens donner à cette neige? «Tous les migrants avec lesquels je me suis entretenu avaient des rêves matériels, explique Diego Queimada-Diez. Leur image de l’Amérique se constituait de frigos, d’autoroutes, de gratte-ciel, d’écrans plasma, de voitures… Mais l’un d’entre eux m’a dit qu’il rêvait de la neige qui tombe. Ce rêve si simple, si innocent, si enfantin exprime une autre approche de la vie. Il nous rappelle que derrière les problèmes de l’immigration, le choc des cultures, des nations, des religions, des races, il y a l’expérience humaine. Nous partageons tous des mêmes valeurs, qui sont le rêve et la poésie.»

VV Rêves d’or (La Jaula de oro), de Diego Queimada-Diez (Guatemala, Espagne, Mexique, 2013), avec Karen Martinez, Rodolfo Dominguez, 1h42.