Tout le monde connaît ses sonorités si distinctives. Les lettres en acier qui frappent la feuille blanche d’un coup sec, amorties par un ruban encreur, puis le chariot qu’on replace à chaque changement à la ligne, suivi de son traditionnel tintement. La machine à écrire était incontournable jusqu’à récemment, rapidement supplantée par l’avènement du numérique et de l’ordinateur. Jacques Perrier, directeur du musée qui lui est consacrée à Lausanne, en connaît un rayon. Plus qu’une passion, ce fut son métier, dans le sillage de son arrière-grand-père et de son père. Originaire de Sainte-Croix, la famille Perrier a travaillé chez Hermes-Paillard à Yverdon de la fin du XIXe siècle jusqu’à sa fermeture dans les années 1980.

Depuis, Jacques Perrier révise, répare et revend des machines à écrire. Mais il les collectionne également. Sur des étagères sont disposées des dizaines de ces lourds objets, des plus vieux – remontant jusqu’à 1884 – aux derniers modèles IBM à boule. Impossible de ne pas être ébahi devant ces témoins d’un autre temps, à une époque où il semble impossible de ne pas pouvoir tout faire avec son ordinateur portable. «C’est aussi une histoire de temporalité, dit Jacques Perrier. Pour une simple commande de ruban, on vous envoyait une lettre dactylographiée, avec en-tête. Et s’il y avait une faute, on recommençait tout. Impensable aujourd’hui.»

Au-delà de leur utilité aujourd’hui obsolète, ce sont aussi de fabuleux objets d’art et de technique industrielle. Des mouvements à chevillère, des machines pour écrire en braille, en japonais, en chinois, des calculatrices… Le musée lausannois est une véritable caverne d’Ali Baba. Des modèles célèbres, comme la Hermes Baby, sur laquelle ont travaillé Jack Kerouac, Françoise Sagan et même Pol Pot, aux plus singuliers avec des claviers très spécifiques.

Mais la machine à écrire reste encore d’actualité: «Le producteur du film Populaire, dans lequel joue Romain Duris, est passé chez moi. Je lui ai prêté plusieurs machines pour le film et j’ai participé un mois au tournage.» Si vos doigts frétillent d’envie à l’idée de se poser sur les touches de ces ancêtres, pas de panique, certains modèles sont à disposition pour taper une missive que vous pourrez même envoyer par la suite.

Musée de la machine à écrire, rue des Terreaux 18b, Lausanne, tél. 079/229 13 03, fête d’inauguration ce sa 7 mai, 10h-23h30, www.machineaecrire.ch