Sous le marteau
En passant de main en main, les objets se chargent d’histoires. Les enchères racontent également cela: notre fascination pour le destin des choses. Les choix du magazine T.

60 ans, mon oeil
James Bond est sans conteste l’une des marques les plus puissantes de l’histoire du cinéma, et tout accessoire passé sur un plateau de tournage prend valeur de relique. Jusqu’au 5 octobre en ligne, et le 28 septembre lors d’une soirée événement à Londres, une série de ces objets sera mise en vente chez Christie’s à l’occasion des 60 ans de la série. Omega, notamment, y présentera plusieurs éditions limitées de sa Seamaster, dont certaines ont même orné le saint poignet de Daniel Craig himself. Clou de la soirée, l’Aston Martin DB5 grise spécialement conçue pour les cascades de Mourir peut attendre sera mise en vente entre 1,5 et 2 millions de livres sterling. Pour un montant plus modeste (entre 4000 et 6000 livres tout de même), on pourra s’offrir l’un des yeux bioniques de Primo, le super-méchant incarné par l’excellent Dali Benssalah dans le même film. Très décoratif sur le manteau de cheminée.
«Sixty Years of James Bond», Christie’s, Londres, 28 septembre, christies.com
Vertiges
De ses cages d’escalier sans fin, on ne s’échappe que pour être acculé par une prolifération des philodendrons. Avec Sam Szafran, il y a toujours cette sensation d’être pris au piège. De ses obsessions de peintre, d’abord, puisqu’il peignait inlassablement les mêmes sujets, et des effets de perspective dont il aimait jouer. Figuratif et pastelliste, cet artiste français d’origine polonaise, survivant des camps de la mort où sa famille a été massacrée, aura connu un succès relativement tardif, et une véritable reconnaissance posthume. Peu exposé si ce n’est à la Fondation Pierre Gianadda, son travail fera l’objet d’une belle rétrospective au Musée de l’Orangerie à Paris jusqu’en janvier 2023. Sotheby’s Paris en profite pour exposer plusieurs de ses tableaux issus de collections privées.
Sam Szafran, Sotheby’s Paris, jusqu’au 28 septembre, sothebys.com. «Sam Szafran. Obsessions d'un peintre», Musée de l’Orangerie, Paris, jusqu’au 16 janvier, musee-orangerie.fr
Retenir le temps
On s’arrête d’abord sur cette vanité en argent qui cache le cadran d’une petite montre: le temps passe, qui nous conduit inexorablement vers la mort. Cet objet, un memento mori («souviens-toi que tu vas mourir»), est d’une modernité étonnante lorsqu’on sait qu’il a été fabriqué vers le milieu du XVIIe siècle (il est estimé entre 6000 et 8000 euros). En parcourant le catalogue de vente de la maison Aguttes à Neuilly, c’est l’histoire de l’horlogerie que l’on traverse, de la Renaissance au début du siècle passé. On comprend que, depuis toujours, on a cherché à retenir le temps en lui consacrant la fabrique minutieuse d’objets d’art sublimes.
Par exemple, cette boîte-horloge en or qui s’ouvre pour laisser chanter un oiseau. Décorée de demi-perles et d’un émail bleu transparent sur un fin guillochage en treillis, ce petit trésor mécanique (estimé entre 70 000 et 100 000 euros) a été fabriqué en Suisse au début du XIXe siècle par les frères Rochat, une famille d’horlogers du Brassus qui travaillait notamment pour Jaquet-Droz & Leschot. Autre lot intéressant: une montre de poche Bréguet conçue au tournant du siècle passé, avec quantième perpétuel, phases de la lune, chronographe et répétition des minutes.
«Une histoire du temps», Aguttes, Neuilly-sur-Seine, 28 septembre, aguttes.com