«Vous verrez qu’une fois de plus, Montreux est un festival pas comme les autres.» Dans une vidéo en forme de teaser, Claude Nobs promettait un été torride emmitouflé dans une doudoune jaune canari. Son festival en point de mire pour s’extirper de l’hiver. C’est vrai qu’une fois de plus dans l’histoire du mastodonte estival romand, le patron de la manifestation réalise un numéro d’équilibriste. Si l’on reste quelque peu sur sa faim artistique malgré un programme toujours aussi boulimique qui promet «seize jours, 1000 musiciens, plus de 1000 heures de musique», il n’y a pas non plus de quoi faire la fine bouche.

En guise d’exergue, Claude Nobs a cette jolie formule pour qualifier sa 43e édition et, par-delà, l’esprit du Montreux Jazz: «Le festival n’est pas une liste de courses qui aligne des noms à acheter. C’est pour moi un livre de recettes. Les musiciens, le public et le lieu sont les ingrédients qui, une fois réunis, donnent le menu.» Au tarif gastronomique. Puisque cela aura un coût pour les spectateurs, compris entre 65 francs (premier prix au Miles Davis Hall) et 220, voire 300 francs (un fauteuil à l’Auditorium Stravinski).

C’est que du 3 au 18 juillet, l’événement de la Riviera a épicé son offre en misant sur quantité d’exclusivités scéniques suisses. Histoire de lui conférer son aura d’expérience musicale unique sur la cartographie estivalière. A défaut de compter comme ces dernières années sur d’incontestables figures fédératrices tels Leonard Cohen, Quincy Jones, Prince ou Santana, Montreux voit largement au-dessus de la ligne d’horizon jazz (où se greffent par ailleurs McCoy Tyner, Madeleine Peyroux ou Jeff Beck), avec encore de la pop, du rock, de l’electro, du hip-hop, de la salsa, des télescopages entre classique et jazz, du folk ou de la soul en ce cinquantenaire du label Motown (mais où est la soirée célébrative d’ailleurs hormis la filiation Raphaël Saadiq?).

En 2009, la légende devra donc s’écrire différemment. Dans un dosage entre les «vieux de la vieille» (Oscar D’Leon, Status Quo, B.B. King, Solomon Burke, Alice Cooper, Donna Summer, George Benson, George Duke ou Bettye Lavette), des figures pop-rock émergentes (le folk d’Alela Diane, l’électro-pop de Klaxons et Lily Allen, un concert symphonique d’Anthony & The Johnsons, la soul sous influence Motown de Raphaël Saadiq, le retour rock racé de Grace Jones, le rap de Mos Def, l’electro de Yuksek, les expérimentations rock enténébrées de Bloc Party ou les chansons folk-pop graciles d’Emily Loizeau) et, surtout, d’excitantes et inédites rencontres.

Où Herbie Hancock côtoiera le pianiste Lang Lang et l’Orchestre national de Lyon autour d’œuvres de Gerschwin et Ravel entre autres, où trois soirées hommages autour des 50 ans du label Island de Chris Blackwell – qui a révélé au monde Bob Marley et le reggae – avec Baaba Maal, Angélique Kidjo, Ray Lema, Sly & Robie et Marianne Faithfull promettent d’être exceptionnelles (lire ci-dessous). A signaler encore en forme de créations décloisonnantes une lecture en musiques du tandem Philippe Djian – Stephan Eicher dans le cadre du château de Chillon, une Faithfull en récitante dévouée des Sonnets de Shakespeare ou un hommage à Nina Simone avec Lizz Wright ou Dianne Reeves.

Quant à l’offre musicale gratuite – celle du Montreux Jazz Café notamment –, stratégie sur laquelle le Montreux Jazz a misé avec succès pour se renflouer (chiffres noirs en 2008 avec un record de 87 000 billets vendus pour 240 000 visiteurs), il faudra attendre le mois de mai pour en connaître la teneur. Et qui sait, découvrir les réelles surprises attractives de cette édition 2009 au-delà de ces projets spéciaux toujours périlleux artistiquement.

Montreux Jazz Festival, du 3 au 18 juillet. Programme complet: www.montreuxjazz.com. Loc.: site du festival, TicketCorner et Fnac.

Un dosage entre les «vieux de la vieille», des figures pop-rock émergentes et d’inédites rencontres