On craignait la pluie, il n’en est rien. C’est même tout le contraire: il fait grand beau, le ciel est d’un bleu éclatant et malgré la chaleur écrasante, le temps est idéal pour une balade. Sur les hauteurs de Lavaux, Amélie Daniel s’improvise guide de randonnée. Sans avoir à se forcer: marcher est une activité très appréciée par la chanteuse de 31 ans. «Je vais me balader dès que j’ai un peu de temps. Ma famille aime la nature, j’ai été élevée comme ça. Il y a un côté aventure et découverte qui m’attire.»

«Ne pas lâcher»

Elle joint également l’utile à l’agréable en se forgeant, sur les sentiers escarpés, une force mentale qu’elle met à profit dans sa vie quotidienne. «Le sport m’aide beaucoup au niveau mental. Arriver à un sommet demande énormément d’efforts. Quand j’ai beaucoup de concerts, que le travail s’accumule, cette expérience m’aide à ne pas lâcher.»

Ce jeudi matin, elle a choisi de découvrir le bien nommé Sentier des artistes, tout sauf un hasard. «J’ai entendu dire que plusieurs peintres venaient ici pour chercher leur inspiration», justifie-t-elle. L’itinéraire débute à la sortie de la gare de Puidoux-Chexbres. Près d’un kilomètre plus loin, un petit chemin goudronné, bien caché de la route, offre une vue de carte postale sur le Léman et la rive opposée, ainsi que sur le vignoble et les villages du Lavaux, avec la tour de Marsens en contrebas.

Amélie Daniel réside à quelques encablures de Lausanne. Elle se montre particulièrement fière de la beauté de sa région: «Lorsqu’il est venu, Prince a dit que c’était l’un des plus beaux paysages qu’il ait vus.» Elle immortalise le décor, et partage immédiatement le cliché avec ses fans. «Je suis très réseaux sociaux, confie-t-elle. J’utilise beaucoup Facebook, Instagram, et YouTube, notamment. Cela me permet d’être proche de ma communauté, c’est important…»

«Se sentir vivant»

Amélie Daniel marche posément, sereinement. La discussion se déroule sur les mêmes bases tranquilles. Face à la beauté du paysage, la chanteuse originaire de la Broye vaudoise se laisse aller à quelques confidences: «La nature m’inspire énormément. Il y a la notion de liberté, d’évasion, le fait de se sentir vivant. Même si j’ai de moins en moins de temps pour le faire, j’aime bien me poser à un endroit avec un calepin et noter ce que je ressens. Cela me permet de prendre du recul sur le quotidien.»

Quand nous arrivons à hauteur de la tour de Marsens, Amélie Daniel dérive sur ses inspirations musicales. Elle qui classe sa musique dans l’electro-pop cite en premier lieu Phil Collins pour sa capacité à «faire passer des émotions sans beaucoup d’instrumental derrière», ainsi que les Beatles. Elle voue aussi une grande admiration à Michael Jackson, Stromae et Christine and The Queens. «Ils ont réussi à créer des personnages et des univers», s’extasie-t-elle.

Une double personnalité

Entre lac et montagnes, la chanteuse évoque sa double personnalité. «Sur scène, je suis très démonstrative, libérée. En dehors, c’est l’inverse. Je suis timide, à l’origine.» Ce n’est pourtant pas ce qu’elle laisse entrevoir. La jeune femme apparaît détendue, ouverte. «Mes deux facettes se ressemblent beaucoup, malgré tout», glisse-t-elle en haussant les épaules. D’où son choix d’utiliser un nom d’artiste qui se démarque de son identité normale… mais pas trop.

«Je tenais quand même à garder mon prénom. Ça m’aurait fait bizarre de ne pas le voir apparaître», précise-t-elle. A la ville, elle s’appelle Amélie Roder. Sur scène, elle devient Amélie Daniel, en hommage à son grand-père. Passionné de musique, ce dernier l’a beaucoup soutenu à ses débuts. Devenu tétraplégique, il incarnait surtout «un modèle de courage et d’abnégation» aux yeux de la jeune femme toujours très souriante, qui n’hésite pas au moment de se livrer sur certains sujets délicats.

Paléo, son rêve

Sur la route longeant la Corniche, la vue d’une telle étendue d’eau et des vignes en terrasses lui évoque le voyage et le dépaysement nécessaires aux artistes. «Si tu restes chez toi, dans ton studio, tu ne trouves pas l’inspiration. Pour cela, tu dois sortir de ta zone de confort, voir autre chose», dit-elle. Ses excursions à Cuba et aux Etats-Unis lui ont, entre autres, inspiré «Alberto» et «L’Ouest», deux morceaux extraits de son dernier album, Oiseau de nuit, sorti en mars dernier:

A mesure que l’on redescend, les sujets deviennent plus terre à terre. Après avoir détaillé ses grands principes spirituels, Amélie Daniel s’attarde sur la vingtaine de personnes formant l’équipe qui l’accompagne au quotidien. «D’excellents professionnels», qui lui sont totalement dévoués, et dont elle ne cesse de souligner le précieux travail. La chanteuse raconte également son rôle de «marraine musicale» de l’association Caméléon, qui aide les enfants défavorisés et abusés aux Philippines.

La gare de Saint-Saphorin pointe à l’horizon, et avec elle la fin de la randonnée. La guide d’un jour s’en va poursuivre son chemin, et sait précisément où elle espère qu’il la mènera. «J’aimerais vraiment faire une scène au Paléo Festival, et chanter aux Francomanias, à Bulle.» En attendant, elle savoure chaque petite étape du voyage, comme de pouvoir entendre ses chansons à la radio lorsqu’elle va faire ses courses.


Profil

1985 Naissance.

2007 Premier concert en tant qu’artiste solo.

2013 Sortie de son premier album, Cent Souvenirs terriens.

2017 Sortie de son deuxième album, Oiseau de nuit.


Episode précédent

Pierre-Alain Leuenberger, une ascension calculée