Au long de la semaine, «Le Temps» propose des bilans de l'année culturelle.

A Genève, l’année musicale aura été marquée par une passation de pouvoir très attendue. Mais parlons plutôt de saison, en fait, puisque la période classique se décline, comme la scolaire, de septembre à juin. C’est donc en deux parties que s’est articulé le cru lyrique 2019.

De janvier à juin, Tobias Richter était encore aux commandes du Grand Théâtre, l’institution culturelle la plus importante de Suisse romande, avec sa dizaine de productions annuelles d’opéras et de ballets, ses 1300 places et ses 60 millions de budget.

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Les dix ans de règne du Suisse auront comporté leur lot de dièses et de bémols. Et la seconde phase de son mandat aura révélé un affadissement progressif des productions alors que travaux, inondations, retards et autres événements défavorables n’ont pas aidé à la revalorisation de l’Opéra genevois au fil du temps.

Innovation et ambition

Le départ de l’ancien directeur a été entaché par un retour chaotique de l’institution à la place Neuve en février, après plus de trois ans d’exil dans le quartier des Nations, où était implantée la structure provisoire en bois de l’Opéra des Nations. La reprise hâtive sur la scène historique du Ring de Wagner, qui n’avait rien de nouveau à offrir, a précédé une plaisante Médée de Charpentier et un honorable Bal masqué de Verdi, deux productions conclusives sans grand retentissement.

C’est donc peu dire que l’arrivée du successeur de Tobias Richter, Aviel Cahn, s’annonçait comme un événement. Le quadragénaire à la volonté novatrice et à la réputation ambitieuse est entré en fonction de façon fracassante. En ouvrant sa première saison en septembre avec Einstein on the Beach de Philip Glass et Bob Wilson, dans une mise en scène du poète de la scène Daniele Finzi Pasca, le nouveau responsable a posé des jalons à la fois innovants et populaires.

Cette totale réussite place la barre haut. Car obtenir le même niveau de qualités réunies sur des saisons entières n’est pas facile. Avec une Aïda de Verdi esthétique mais pesante, un Orfeo de Monteverdi aux ravissements fugaces et des Indes galantes de Rameau tiraillées entre fosse et plateau, le cru 2019 s’achève ainsi entre questionnements et espoirs.


Réouverture contrariée du Grand Théâtre

Cela devait être une fête, mais des courants contraires ont terni la réouverture du Grand Théâtre. Après de lourds travaux de plus de 60 millions, le retour dans les murs historiques a subi un retard de six mois à cause d’une infiltration d’eau. Les jonglages imposés par ce report ont déstabilisé la programmation. Et l’inauguration, trop précoce, a engendré des problèmes à régler rapidement. La machinerie non révisée grippe. Le 12 février, ni célébration, ni discours. Cet événement en sourdine n’a pas rendu justice aux artisans qui ont œuvré avec passion et professionnalisme à la restauration et à la modernisation des bâtiments. Mais les ors ont retrouvé leur lustre et le public sa scène maîtresse.


A l’OSR, le retour de l’administrateur prodigue

Après huit ans de déstabilisation administrative, l’Orchestre de la Suisse romande (OSR) réassure sa trajectoire. L’ancien administrateur général Steve Roger a été nommé début octobre pour revenir au poste qu’il occupa pendant quinze ans, jusqu’en 2011. Depuis son départ à l’agence Caecilia, ce fut la valse infernale à l’OSR: Miguel Esteban (1 an), Henk Swinnen (3 ans), Jean-Pierre Rousseau (3 mois) en intérim puis Magali Rousseau (3 ans). En retournant vers Steve Roger, qui connaît chaque musicien et chaque membre des équipes techniques, administratives et artistiques, l’orchestre assure ses bases avec une personnalité aussi professionnelle qu’agréable. Un retour salué.