Face aux quais, le restaurant centenaire le Train Bleu, niché au premier étage de la gare de Lyon à Paris et où Coco Chanel, Colette, Cocteau, Gabin, Pagnol avaient leurs habitudes, a fait peau neuve, pour un montant de 4,5 millions d’euros. Plus de deux mois de travaux d’embellissement et de modernisation cet été, confiés à l’agence Duthilleul, en lien avec la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) et les bâtiments historiques, ont été nécessaires pour redonner à cette brasserie de luxe son aspect d’autrefois.

L’architecture du lieu, construit dans le cadre de l’Exposition universelle de 1900 est luxuriante: or, stuc, fresques picturales. Pour ce projet «hors normes», le restaurant «a été entièrement refait, les fresques et peintures nettoyées, les stucs et dorures rénovés, les 1000 m2 de parquet remplacés, les 800m2 de cuisine rénovés, les murs avec les boiseries et les plafonds nettoyés, l’électricité remise aux normes. Le logo a lui aussi été rénové pour lui donner les couleurs bleu roi et doré», explique à l’AFP Gérard d’Onofrio, directeur général de SSP France (Select Service Partner), société chargée de la restauration d’une grande partie de la gare de Lyon. Celle-ci est en contrat de concession avec la SNCF jusqu’en 2020.

La fumée des cigarettes

Depuis la mi-septembre, les clients peuvent découvrir un nouveau décor mêlant des éléments de la Belle Epoque avec du mobilier en bois massif à du mobilier contemporain, au sein de cet établissement qui s’appelait jadis «le buffet de la gare de Lyon». «Pour une question de coût, on s’est limité à faire un nettoyage des fresques, car il ne faut pas oublier que cent ans d’existence, c’est aussi la trace de qautre-vint-dix ans de fumée» de cigarettes, autorisées en salle jusqu’à fin 2007, raconte M. d’Onofrio.

Ce lieu centenaire où ont été notamment tournées des scènes du film Nikita de Luc Besson, et qui accueille chaque jour 1000 clients répartis à égalité entre les deux salons et le restaurant, compte 40 fresques marouflées référentes des villes traversées par le train. «La dernière rénovation datait de 2000. Celle-ci est plus importante, et était nécessaire pour jouer l’équilibre du voyage dans le temps et de l’expérience contemporaine», complète Patrick Ropert, directeur de Gares & connexions, évoquant un «lieu de destination» qui reste «très prisé».

Une brasserie haut de gamme

Pour M. d’Onofrio, «cette vieille dame bâtie sur une structure métallique de Gustave Eiffel représente le plus beau restaurant dans les gares et le plus architectural sur la place de Paris». Il cite en exemple les trois lustres «monumentaux» d’une tonne chacun, définitivement scellés dans la structure de l’industriel français.

Côté restauration, «c’est plutôt une brasserie haut de gamme qu’un restaurant gastronomique», insiste-t-il. Il n’y a pas dans cet établissement de 120 employés «de prétention à décrocher une étoile, c’est un service traditionnel, avec des niveaux de standards et de qualité élevés», affirme-t-il cependant.

En cuisine: «Gabin»

La nouvelle carte a été élaborée par Jean-Pierre Hocquet, chef du Train Bleu, surnommé la «Bête humaine» du Train Bleu, ou «Gabin», comme l’acteur qui incarne le mécanicien de la Lison, héros de ce film de Jean Renoir (1938). Il a été assisté d’Eric Léautey, consultant et formateur chez Lenôtre, ainsi que Christophe Adam, ancien chef pâtissier de Fauchon.

Ris de veau rôti aux oignons et céleri, turbot poché au bouillon de coquillages, ou crème légère au citron et yuzu – cet agrume jaune très «tendance» – ont ainsi fait leur apparition. «Il s’agit d’une carte rénovée, mais les traditionnels plats emblématiques du restaurant tels que le gigot d’agneau rôti, la côte de veau ou encore le fameux baba au rhum, sont toujours présents au menu», note le directeur général de SSP France, précisant que le prix moyen d’un repas s’élève à un équivalent de 70 à 85 francs suisses.

Les Asiatiques friands

Le personnel, lui, s’est doté de nouvelles tenues bleu et or pour accueillir la clientèle, pas uniquement composée de voyageurs. «De nombreux tour operators asiatiques, notamment, inscrivent dans leur parcours un passage au Train Bleu pour un dîner», raconte M. d’Onofrio.

Le but est de «faire des gares de vrais lieux de destination, comme cela a été fait avec le restaurant Lazare» situé au cœur de la gare du même nom, ajoute M. Ropert, citant «d’autres projets», «au moins trois sur des créations ou rénovations des espaces qui pourraient devenir de vrais pôles d’attractions».