L'une des forces du film de Marcel Schüpbach est de mettre en parallèle le travail du TPI et celui des femmes qui, au pays, animent les associations de victimes. Elles ont perdu frères, maris, enfants et petits-enfants durant la guerre, en particulier à Srebrenica, et interpellent la procureure du TPI. Elle répond ici à trois opinions exprimées dans le film.

• «A La Haye, on expose la vérité, mais on ne satisfait pas la justice.»

Carla Del Ponte: Je connais bien ce reproche, qui repose sur la question des peines infligées aux condamnés. Les victimes jugent les peines trop faibles, et je les comprends. Mais nous devons tenir compte du contrat passé avec les prévenus, s'ils plaident coupables. Comme tout contrat, il engage les deux parties et inclut une réduction de peine pour avoir plaidé coupable. Il y a quelques jours, un condamné pour lequel nous demandions 18 ans de réclusion a eu une réduction de peine. Naturellement, je suis déçue. Mais en tant que procureure, mon travail est d'isoler l'accusé, de dresser l'acte d'accusation et, surtout, d'obtenir que cet acte soit confirmé au terme du procès. La peine, elle, relève de la responsabilité du juge.

• «Elle nous donne de faux espoirs»

- C'est malheureusement vrai. J'essaie autant que possible d'expliquer ce que nous faisons pour avoir, en particulier, Radovan Karadzic et Ratko Mladic, dont l'absence au tribunal est ressentie comme l'élément le plus douloureux par les victimes. Et ils sont toujours en fuite... Au fond, je partage cette désillusion. Mais par ma fonction, je suis aussi responsable du fait qu'ils ne sont pas incarcérés.

• «Les femmes ressentent mieux et comprennent mieux que les hommes»:

- Je comprends qu'une femme victime se sente plus en confiance ou mieux acceptée par une femme procureure. Mais dans l'exercice de mes fonctions, cela ne fait pas différence.