S'ouvrant sur les lèvres pulpeuses, amoureusement photographiées d'Angelina Jolie, qui raconte son histoire («ceci n'est pas une histoire d'amour, mais une histoire sur l'amour») depuis une prison où elle attend l'heure de son exécution, Péché originel s'annonce d'emblée comme un objet bizarre. Et passablement kitsch. Pour ne pas avoir su choisir entre film noir, mélodrame en costumes et porno soft, cette nouvelle adaptation du Waltz into Darkness de Cornell Woolrich (paru en 1947 sous le pseudonyme de William Irish) restera bancale jusqu'au bout au lieu de décoller. Mais au moins, ses rebondissements tarabiscotés, son couple de stars très «hot» et sa mise en scène parfois aberrante retiennent l'attention.
L'expérience du spectateur variera sans doute sensiblement selon qu'il a en mémoire ou non le beau film de Truffaut avec Deneuve et Belmondo. Quoi qu'il en soit, le roman, dont l'action était située en Louisiane, a une encore une fois été adapté très librement, avec Cuba en 1880 comme décor (après l'île de la Réunion et le sud de la France), sans compter une nouvelle fin du cru du cinéaste. Scénariste passé à la mise en scène, Michael Cristofer (Sexe attitudes/Body Shots) n'est pas de ceux qui se satisfont d'un minimum. Au contraire, comme pour souligner le côté pulp du récit, il opte pour des excès résolument baroques. Hélas, lumières capiteuses, savants mouvements de caméra et autres effets stroboscopiques s'avèrent plus souvent maladroits qu'ils n'évoquent Max Ophüls ou Martin Scorsese, modèles pourtant visés. Seuls les accents latino-jazz de Terence Blanchard (le compositeur de Spike Lee) créent un semblant de climat. Juste avant un dénouement risible, on aura toutefois frôlé du très grand cinéma dans la scène où l'héroïne doit enfin choisir entre les deux hommes de sa vie: à cet instant, la vraie folie qui rôde toujours chez Woolrich/Irish embrase vraiment l'écran.
Péché originel (Original Sin), de Michael Cristofer (USA 2001), avec Antonio Banderas, Anjelina Jolie, Thomas Jane, Jack Thompson.