Une pièce imposée, deux œuvres libres: les finalistes ont chacun défendu trois pièces lors de la dernière ligne droite au Concours de percussion. Yu-Ying Chang (Taïwan, 29 ans) a paru la plus détendue des trois, la plus souriante aussi. Son solo de marimba («Mara-Mara» d’Isabel Urrutia Rasines) l’a possiblement desservie. Plus attrayante que dense, cette pièce qui jongle constamment entre l’aigu et le grave du clavier s’avère un peu faible du point de vue de l’écriture. Le jeu très souple et fluide de la Taïwanaise impressionne dans «Ground» de Norio Fukushi. Dans cette pièce qui utilise le plein instrumentarium de la percussion, elle brosse une toile de sons cohérente, une ligne surtout. Le passage très rapide d’un objet à l’autre n’entrave pas le flux musical.

Au mystère qu’apporte Yu-Ying Chang dans «skr (i) pt» du Genevois Eric Gaudibert, le Français Rémi Durupt (26 ans) défend un jeu plus tonique, plus «yang», ce qui ne l’empêche de développer de fines nuances lors des passages en apesanteur. Cette pièce de musique de chambre fine, nerveuse et transparente, mais un peu surannée en raison de l’utilisation d’une voix de mezzo en onomatopées (Laure-Anne Payot parfaitement dans le style), réclame une attention de tout instants. «Ecco…» de Julien Dassié pour vibraphone solo sonne comme une étude sur les micronuances et glissements de perspective harmonique (on pense à l’Etude pour piano «Automne à Varsovie» de Ligeti). Rémi Durupt y développe un vrai monde intérieur. Quant à «Moi, Jeu» pour marimba solo de Bruno Mantovani, c’est une pièce ponctuée de contrastes dans les registres extrêmes qui fascine par son écriture complexe et hautement volubile.

Des trois finalistes, Alexandre Esperet a paru le plus frais, le plus intuitif. Ce jeune Français (22 ans), un peu absent et dispersé dans la pièce de Gaudibert, parle avec le langage de son corps. «She who sleeps with a small blanket» de Kevin Volans développe un monde sonore proche des percussions africaines, d’où la forte adhésion du public. Un poète s’exprime dans «Marrrimba» d’Andy Pape, pièce qu’il nimbe de mystère, mais le jury n’a pas estimé qu’Alexandre Esperet méritait un 3e Prix pour l’ensemble de ses prestations au Concours de Genève.