A l'annonce de sa nomination, le nouveau chef de la Section cinéma de l'Office fédéral de la culture (OFC) intervenait dans l'émission Forums, sur La Première. Et sa voix semblait sortir d'outre-tombe: on savait le poste exposé – son prédécesseur Marc Wehrlin, actuel directeur adjoint de l'OFC, avait lui-même fini par devenir fantomatique. Jusqu'à la clôture, le samedi 13 août, Nicolas Bideau sentira ses oreilles siffler et son nez lui gratter: on débattra de sa voix, de sa ressemblance avec son père, de ses cheveux gris, de ses tenues.
Qui souffrira d'un arrêt du saupoudrage des aides de l'OFC?
Pour détourner l'attention accordée à son apparence, Nicolas Bideau a déjà dégoupillé une grenade que le sérail va se refiler comme une patate chaude. Il a dit en substance: fini le temps du saupoudrage, désormais les aides au cinéma seront plus ciblées et moins éparpillées (sous-entendu éventuel: y compris à ceux qui n'ont aucun talent). Mais comment la Section cinéma va-t-elle choisir ses chouchous sans froisser la multitude qui, jusque-là, obtenait de l'argent? L'amitié de Nicolas Bideau pour certains cinéastes va faire grogner, mais peu dans les rangs romands qui ont pratiqué un lobbysme intense en sa faveur dès Locarno 2004. D'autres vont tenter d'en être: qui osera le panier de spécialités tessinoises dans sa chambre d'hôtel?
Pascal Couchepin lâchera-t-il une nouvelle bombe?
Entre Locarno 2004 et Locarno 2005, la tête de la Berne culturelle n'a pas seulement été liftée: elle a été coupée (exit David Streiff, patron de l'OFC, et déplacé Marc Wehrlin, chef de la Section cinéma), remplacée, «romandisée» auront surtout noté les lobbys déçus d'outre-Sarine (bonjour Jean-Frédéric Jauslin à l'OFC et Nicolas Bideau au cinéma). Il aura suffi d'une visite de Pascal Couchepin lors de la précédente édition et, d'une phrase lâchée dans Le Temps: «Dans le cinéma suisse, certains s'arrogent un jugement de droit divin.» A la tête du Département de l'intérieur et à ce titre ministre de la Culture, il parlait de ses propres troupes. Inutile de préciser que, un an après, tous les journaux attendent de le rencontrer avec impatience.
Qui succédera à Irene Bignardi?
La directrice artistique du festival s'en va à l'issue de cette édition. Les quelques papables présents à Locarno seront harcelés de questions durant toute la quinzaine. Mais ils devront adopter profil bas, jusqu'à ce que le président de la manifestation, Marco Solari, sorte de son chapeau, probablement dimanche 14 après le conseil du festival qui se tiendra vers 11 heures, le nom du successeur d'Irene Bignardi. Il semblerait que seuls quatre noms sont encore en lice: ne seraient plus dans la course les Italiens Giorgio Cossetti, ex-président de Film Italia, et Alberto Barbera, l'ancien directeur de la Mostra de Venise, ainsi que l'Allemand Wieland Speck, responsable de la Section panorama du Festival de Berlin. Alors qui sera-t-il ou elle? Première nouvelle, les quatre sont francophones: la Française Marie-Pierre Macia, ex-déléguée de la section Quinzaine des réalisateurs à Cannes; le Suisse Marc Maeder, qui a fait du chemin depuis son poste d'assistant de Christian Defaye à Spécial Cinéma puisqu'il est actuellement directeur des ventes de Fox France à Paris; Frédéric Maire, journaliste, cofondateur de La Lanterne magique et, notamment, collaborateur de longue date du Festival de Locarno; et Jean Perret, directeur des Visions du réel de Nyon.
Samir, seul Suisse en compétition, sera-t-il à la hauteur?
Le directeur du Festival de Locarno est toujours attendu au tournant par le sérail du cinéma suisse. Combien de films sélectionnés? Qui en compétition? Avec le Zurichois Samir et son Snow White, la Suisse a de bonnes chances.
Où dormirez-vous l'an prochain?
En 2006, les festivaliers pourront toujours chercher les hôtels Verbano, Zurigo, Muralto, Beaurivage, Reber au Lac, Stazione et même le mythique Grand Hôtel: ils n'existeront plus. En moins de trois ans, depuis la fermeture du Verbano en 2003, la ville de Locarno aura perdu 500 chambres. Et sans aucune perspective de remplacement à moyen terme. Depuis longtemps, les vedettes du festival sont logées à Ascona, qui compte au moins quelque quatre et cinq-étoiles. A présent, c'est tout le festival, par la voix de son président Marco Solari, qui parle d'éventuellement s'y déplacer. Ou alors ailleurs? Voire même hors du Tessin? Tout sera imaginé ces dix prochains jours, car les terrasses de Locarno n'aiment pas seulement les films, elles adorent tricoter des scénarios.
58e Festival international du film de Locarno, jusqu'au 13 août. http://www.pardo.ch