Danser, un métier presque comme un autre
scènes
Depuis maintenant dix ans, le Centre de formation professionnelle Arts forme à Genève des danseuses et des danseurs contemporains

Par petits groupes, les élèves s’avancent au milieu de la salle. Ils interprètent des mouvements, que leur suggère la chorégraphe Caroline Lam. Une batterie donne le tempo. Cette formation professionnelle initiale en danse contemporaine, unique en Suisse, fête ses 10 ans. Ce cursus de quatre ans débouche sur un CFC ou une maturité professionnelle. Les jeunes gens, âgés de 16 à 20 ans, dansent entre dix-sept et vingt-cinq heures par semaine pendant toute leur formation.
La danse contemporaine se nourrit du parcours de chacun, explique Caroline Lam, responsable adjointe de la filière danse contemporaine au Centre de formation professionnelle Arts (CFP Arts). Si les élèves ont pratiqué au préalable le hip-hop, les arts du cirque ou de la gymnastique artistique, cela donnera une couleur particulière à leurs mouvements.
Plus besoin de s’exiler
Leo, 19 ans, fait du cirque depuis son enfance. «Je vois que je comprends différemment les mouvements que mes camarades. Faire du cirque m’a sans doute donné une sensibilité particulière», explique-t-il. Il a interrompu une formation de bijouterie-joaillerie pour bifurquer après deux ans vers la danse. Ce n’est pas le cas d’Eva, 17 ans, une des plus jeunes élèves de sa classe: elle est entrée au CFP Arts directement à la fin du cycle genevois.
Sans cette école, elle n’aurait certainement pas choisi de se former en danse. «Les petits rats de l’Opéra de Paris m’inspirent depuis que je suis toute petite», dit celle qui a commencé à danser vers l’âge de 4-5 ans. «Mais ce chemin me semblait bien trop dur.» Après leur formation, les élèves peuvent rejoindre des écoles en Suisse pour décrocher un bachelor à la Manufacture à Lausanne ou à la Zürcher Hochschule der Künste (ZHDK) de Zurich, deux formations lancées en 2014. Un master en chorégraphie et pédagogie à Zurich a été proposé dans la foulée.
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Avec une matu professionnelle décrochée à Genève, les élèves peuvent également entrer dans une école d’art. Ils peuvent encore être directement engagés par une compagnie, mais la plupart des élèves préfèrent poursuivre leur formation. Eva et Leo aimeraient entrer à la Manufacture de Lausanne à l’automne prochain, mais cette école n’ouvre pas chaque année des classes en danse et 2022 sera une année blanche. Du coup, Eva passe des auditions pour entrer en bachelor dans une école à Amsterdam, Salzbourg ou Bruxelles tandis que Leo a déjà des projets de spectacles cette année.
Un retard à rattraper
«La Suisse est en train de rattraper son retard par rapport au système de formation européen, estime Caroline Lam, formée au Centre national de la danse à Lyon et à Paris. Il y a vingt ans, le danseur n’avait pas de statut en Suisse. La certification est une façon de donner un statut à une profession. Auparavant, un comédien qui sortait du Conservatoire avait un salaire minimum, mais un danseur non. L’enjeu était donc de faire reconnaître ce métier», poursuit l’artiste qui continue de danser et de créer en parallèle à son activité d’enseignante.
Les élèves viennent de toute la Suisse: l’école en sélectionne une quinzaine sur environ 50 jeunes gens et jeunes filles qui se présentent chaque année. «Cette formation est encore jeune et ne s’adosse pas à une école de danse déjà existante comme c’est le cas de la TAZ à Zurich.» Si ce cursus est unique en Suisse, il en existe des similaires en danse classique à l’Académie de danse de Zurich (TAZ) et à l’Ecole de ballet du Théâtre de Bâle. Et depuis l’automne dernier, 16 jeunes ont commencé une formation CFC/matu pro en comédie musicale à la Musical Factory de Lucerne.
Plusieurs événements sont prévus à l’occasion des 10 ans de la filière danse contemporaine de Genève. L’événement phare est prévu le 30 juin au Pavillon de la danse avec la création de la compagnie Anthrop pour la volée, une reprise de la première création pour le CFC danse de la compagnie 7273. Auparavant, le CFP Arts participera à la Fête de la danse Genève du 11 au 15 mai ainsi qu’à la Fête de la musique du 24 au 26 juin.