Tout savoir et tout dire
On le voit, Charlotte Filou a le sexe moins filou qu’érudit (il fallait la faire celle-là) et, à l’écriture avec la joyeuse équipe, entend bien placer le curseur à une certaine hauteur. Mon voisin de gauche soupire à ces considérations élevées, mais se mobilise plus spontanément lorsque Cléa Eden, blondeur élancée, raconte tout ce qu’elle a fait pour devenir l’Amante parfaite. Tutos, pornos, sodo, la jeune femme, qui a cumulé diktats et infos, vit moyennement ce devoir de «tout savoir et tout exprimer pour être performante et/ou exaucée». Sur le bord de la fenêtre, le regard dans le lointain, elle se souvient avec tendresse de sa première fois, «ce truc nul-génial» qui, aujourd’hui, la frappe par sa simplicité.
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C’est que le sujet est chargé. Et depuis le début de l’humanité. Enchaînant avec les cosmogonies, grecque, égyptienne et chrétienne, Angelo Dell’Aquila montre comment, dès l’origine, le fruit est défendu et le plaisir, condamné. A ses côtés, ses deux compagnons incarnent tour à tour Ouranos et Gaïa ou Adam et Eve et leur pantomime super-explicite dégonfle la baudruche de la culpabilité. Le public rit, comme il pouffe aussi lorsque Angelo raconte l’achat de ses premières capotes à 16 ans, un âge où il croyait posséder la BDE, pour Big dick Energy…
Vidéos et fantasmes
La soirée – un peu trop longue, mais il faisait très chaud, samedi soir – se déroule ainsi entre récits, propos érudits, statistiques plus ou moins sérieuses et expériences plus ou moins foireuses menées dans les toilettes de la salle transformées en Experiment Box avec orgasmes promis à la clé. Peut-être que la scène des vidéos inspirées de YouTube est de trop? En tout cas, elle ne rencontre pas le même succès que les parties de stand-up. Les fantasmes aussi, pourtant recueillis dans le public au moyen d’un bulletin secret, n’ont pas le même relief que les moments joués et parlés. Mais le tout est joyeux, partageur, adressé à chacun(e), les yeux dans les yeux. On rougit? Un peu et c’est tant mieux.
Dukudukuduku , jusqu’au 4 juin, Centre culturel des Grottes, Genève, 076 525 9692