Tim Burton préside un jury constitué des comédiennes Kate Beckinsale et Giovanna Mezzogiorno, de l’acteur Benicio del Toro, de l’écrivain Emmanuel Carrère, du directeur du Musée national du cinéma de Turin et ancien patron de la Mostra de Venise Alberto Barbera, des réalisateurs Victor Erice et Shekhar Kapur, ainsi que du compositeur Alexandre Desplat. Le cinéaste américain a-t-il imaginé un stratagème qui, comme Roman Polanski ou Isabelle Adjani autrefois, lui permettrait d’avoir la mainmise psychologique sur l’ensemble des jurés? Ou a-t-il, comme Sean Penn, décidé de porter au pinacle un film politique ou engagé? Rien de tout cela. Burton, même un peu tremblant devant la presse internationale, est cool. L’exercice du jury 2010 sera décontracté. Comme la rencontre avec la presse, amicale comme un thé entre amis.

Tim Burton: «Nous avons bien mangé hier soir, sans nous poser plus de règles que ça. Le but, selon moi, est d’arriver sans préjugés, avec une compassion absolue pour chaque film. Laissons-nous sentir les films. Nous découvrirons en discutant ce que chacun d’entre nous aura comme inclination. Je déteste le mot juge ou même juré: nous somme simplement ouverts. Et je sais depuis hier soir que mes camarades partagent mon point de vue. Nous ne souhaitons pas être jugés comme juges... Je sais qu’aucun film fantastique n’est sélectionné, mais le festival est fantastique. L’honneur d’être invité ici me comble. Je suis aussi conscient que la plupart des films présentés ici ne seront pas montrés partout ensuite. Il y aura toujours de gros films comme Alice au pays des merveilles. Mais je me suis toujours battu pour que les choses n’aillent pas que dans un seul sens. Nous allons donc nous battre ici pour défendre tous les films possibles. Je me réjouis d’être surpris, parce que c’est ça que j’attends de cette expérience. Je n’entends pas attirer l’attention, a priori, sur le film qui sera, par exemple, le plus politique. Tout ce que je demande, c’est que nous restions ouverts.»

Kate Beckinsale: «Je suis arrivée après le dîner à cause du volcan et je m’attendais à ce que Tim me tape pour mon retard. Mais il a été charmant, comme tous mes camarades.»

Alexandre Desplat: «Nous sommes très heureux d’avoir Tim Burton comme président: il est l’un des rares auteurs du cinéma américain capable de faire aussi bien des films personnels et des superproductions. Ça lui donne un point de vue très important dans le cinéma actuel.»

Benicio del Toro: «Quand on m’a appelé et qu’on m’a dit qui était le président, j’ai immédiatement accepté. En découvrant la liste, ensuite, je n’en ai pas cru mes yeux en voyant que le grand cinéaste espagnol Victor Erice était de l’aventure. J’avais toujours rêvé qu’il m’appelle pour tourner. Cette fois, il ne pourra plus m’éviter.»

Shekar Kapur: «La question à propos de l’absence de réalisatrices dans la compétition est stupide. C’est peut-être une question politique. Mais elle n’entre nullement en compte dans la création d’un film: je crois que tout le monde est d’accord pour dire que les artistes ont tous une capacité à faire parler leur part masculine et féminine. Un réalisateur sans part féminine n’est pas un artiste.»

Giovanna Mezzogiorno: «Je n’ai jamais regardé la vie selon combien de femmes ou d’hommes sont représentés. Nous sommes deux femmes et sept hommes dans ce jury. Et alors? Nous sommes surtout des êtres humains.»

Kate Beckinsale: «La question des genres n’entre pas en ligne de compte. Dans le cinéma, nous y sommes très habituées: les femmes sont minoritaires, c’est un déséquilibre qui existe partout dans nos sociétés. Comme actrice, je suis sans cesse entourée d’équipes masculines et ça ne me pose pas de problème. C’est juste comme ça.»