Fatna Djahra et Michele Millner animent un gentil délire métallique.
Elisabeth Chardon
Le squelette de l'histoire a été repris dans maints albums pour enfants, à commencer par le célébrissime Max et les maximonstres, de Maurice Sondak. Un enfant puni se retrouve dans sa chambre soudain transformée en un pays peuplé de monstres dont le garnement imaginatif est bien sûr le souverain. Dans Balthazar fait son bazar, première création de la saison du Théâtre des marionnettes de Genève, en collaboration avec le Théâtre Spirale, le délire s'ouvre à la troisième dimension. Mais aussi à la musique, avec des compositions d'Yves Cerf, bien relayées par les deux comédiennes. Cela donne un spectacle dense, riche en images.
Tout commence par de gros cubes en bois, comme un jeu de construction aux couleurs gentiment désuètes, peut-être hérité d'un grand-oncle. Fatna Djahra et Michele Milner vont jouer avec les cubes, les empiler, les ouvrir... pour accompagner le héros de l'histoire dans les différentes échelles de ses aventures en chambre. Le héros, c'est donc Balthazar. Pauvre héros a priori. Construite à partir de couvercles de boîtes de conserve, avec deux brosses pour les jambes, deux pinceaux pour les bras, on ne peut pas dire qu'il ait fière allure. On peine un peu à croire à ce personnage. Cela rendra d'autant plus fantastiques ses rencontres avec les monstres, tous construits comme lui à partir d'éléments métalliques de récupération. La scénographe, Einat Landais, en a créé une belle brochette à partir de restes de landaus et de râpes à fromage. Leurs formes animales sont encore soulignées par des passages en ombres chinoises.
Lors de la première, la plupart des enfants participaient de bon cœur à ce voyage initiatique, lançant des «attention Balthazar!». Mais une ou deux voix trahissaient un désarroi face à ce «bazar». «Je ne comprends rien!» s'est énervé un garçon. Mais n'est-ce pas simplement le signe que Balthazar fait son bazar a pris quelques risques? Le rythme et l'esthétique marient sans crainte poésies douce et trash. Et, malgré un jeu parfois un peu trop énergique par rapport à l'espace restreint, on assiste à un joli délire.
Balthazar fait son bazar, au Théâtre des Marionnettes de Genève, rue Rodo 3. Me à 15h, sa à 17h, di à 11h et 17h. Jusqu'au 13 nov. (Rés. au 022/418 47 77).