Yves Benot. La Révolution française et la fin des colonies 1789-1794
Yves Benot. La Révolution française et la fin des colonies 1789-1794. La
Yves Benot. La Révolution française et la fin des colonies 1789-1794. La Découverte, 286 p.
En 1794, la Convention vota l'Abolition de l'esclavage. Le sujet a longtemps été occulté: presque toutes les grandes histoires de la Révolution passent sous silence un événement aussi remarquable. Yves Benot y consacre cet essai, en analysant le cas de Saint-Domingue, de loin la plus grande des possessions françaises. Il a raison: contraire aux principes égalitaires, l'esclavage était un élément fondamental de l'équilibre économique de la nation par la réexportation des denrées coloniales et la traite. On rêvait d'abolition depuis le milieu du XVIIIe siècle, sans toujours comprendre ce qu'on voulait abolir. On peut être pour l'esclavage, mais contre la traite (comme beaucoup d'Anglais), on peut haïr l'esclavage mais vouloir garder les colonies, ou souhaiter s'en défaire (comme Mirabeau); on peut avoir sur la liberté des mulâtres toute une gamme d'idées. Benot montre l'origine et le développement de ces courants malgré la violente opposition des colons. Son livre est destiné surtout aux spécialistes. Il en fâchera quelques-uns, comme les partisans de Robespierre, qu'il refuse d'encenser, ou ceux de Babeuf, dont il estime à tort qu'il ne s'intéressait pas aux Noirs. Il flattera, en revanche, les admirateurs de Diderot, Grégoire ou Condorcet. Et il convaincra la plupart avec sa conclusion nuancée: l'Abolition de 1794 n'a pas été une capitulation devant l'insurrection générale des esclaves; des militants courageux, à Paris, la voulurent et la préparèrent au nom des principes, avec l'appui d'une partie des sans-culottes.