Au deuxième semestre 2016, Airbnb a engrangé des bénéfices, selon une information de Bloomberg diffusée la semaine passée. Une première dans l’histoire de la start-up lancée en 2008. La performance est d’autant plus remarquable que Airbnb, valorisé à 30 milliards de dollars, a dû faire face aux contraintes imposées par les villes de San Francisco et New York sur le nombre de nuitées autorisées chez ses hôtes.

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Le logiciel mange toujours le monde (éditorial)

D’après Bloomberg, l’entreprise s’attend même à rester bénéficiaire en 2017. Et elle disposerait d’un trésor de guerre de 3 milliards de dollars. Le modèle d’affaires – 6 à 12% de commission sur le prix payé par le voyageur – semble fonctionner, faisant d’Airbnb un candidat à une entrée en bourse cette année.

Mais dans l’univers des «licornes» – ces start-up valorisées à plus d’un milliard de dollars –, le cas Airbnb fait figure d’exception. Sur les 183 «licornes» recensées par CB Insights, rare peuvent se vanter d’avoir atteint le seuil de rentabilité.

Boîtes noires

Ces entreprises privées n’ont pas d’obligation de publier leurs résultats financiers. Les analystes en sont donc souvent réduits à spéculer, comme avec Space X, valorisée à 12 milliards de dollars. Son contrat de 4,2 milliards de dollars avec la NASA, un carnet de commandes plein et les coûts de lancement les plus bas du marché laissent penser que la société imaginée par Elon Musk gagne de l’argent. Mais l’explosion sur le pas de tir de la fusée Falcon 9 en septembre dernier a forcément eu un impact négatif sur ses finances.

L’été dernier, Drew Houston, le directeur de Dropbox, se réjouissait d’être sur le chemin de la rentabilité avec 200 000 entreprises clientes, quatre fois plus qu’en 2014. Les ventes annuelles de Dropbox attendraient le milliard de dollars, un dixième de sa valorisation. Comme pour les sociétés Anaplan ou Symphony, Drew Houston assure que Dropbox est «cash flow positive» et donc moins dépendant des investisseurs.

Le profit n’est pas une priorité

Jusqu’ici, l’absence de profit n’a jamais effrayé ces investisseurs. «La croissance à tout prix pour gagner des parts des marchés et être le numéro un reste la priorité par rapport à la rentabilité», explique Jean-Baptiste Su, analyste chez Atherton Research. «La valorisation est basée sur le potentiel de croissance.»

Ne pas être rentable n’empêche pas par exemple AppDynamics d’être courtisé par Cisco pour près de 4 milliards de dollars. Un rachat ou une introduction en bourse justifient la patience des investisseurs. C’est ce qui explique une déclaration comme celle de Chris Wanstrath, patron de GitHub. Alors que son entreprise, valorisée à 2 milliards de dollars, a perdu 66 millions sur les neuf premiers mois de 2016. «Nous avons levé 250 millions de dollars l’an dernier et nous nous en servons. Nous ne prévoyons pas d’être rentables pour l’instant.»

Trois milliards de pertes en 2016 pour Uber

Mais aucune «licorne» n’a perdu autant qu’Uber en 2016. Entre concurrence aux Etats-Unis de Lyft (qui a perdu 600 millions de dollars l’année passée) et échec sur le marché chinois, la société fondée par Travis Kalanick a subi 3 milliards de dollars de pertes.

Elle reste la start-up la plus valorisée au monde (69 milliards de dollars) alors qu’elle attend toujours ses premiers bénéfices. La croissance à tout prix a ses limites. «C’est ce qui a poussé Uber à quitter la Chine. Ce n’était plus tenable d’y perdre des milliards sans être certain de gagner face à Didi», commente Jean-Baptiste Su. Selon l’analyste, afficher des profits pour une entreprise comme Uber n’a rien d’impossible. «Il lui suffit de diminuer ses coûts en ralentissant légèrement son développement ou en augmentant les commissions qu’Uber prélève ou les deux à la fois.»